Une fois n’est pas coutume, les mauvaises relations entre Alger et Paris refont surface alors que le célèbre Prix Goncourt a été décerné à l’écrivain franco-algérien Kamel Daoud pour son roman de fiction Houris, dont l’intrigue se déroule durant la décennie noire en Algérie. La presse spécialisée a rapidement dénoncé une politisation de ce prix, qui assure à son lauréat un succès retentissant en librairie, avec des retombées commerciales incalculables.
Le jury du Goncourt a ainsi voulu signifier, sans le dire explicitement, son mécontentement suite à l’exclusion de la maison d’édition Gallimard, l’éditeur de Kamel Daoud, lors du dernier salon du livre tenu à Alger, un incident qui a ajouté aux tensions déjà existantes entre les deux pays. L’auteur à succès, qui a obtenu la nationalité française après avoir trouvé refuge en France, lassé du climat répressif régnant dans son pays, multiplie depuis ses débuts les ouvrages à succès dans les librairies françaises, avec des thèmes axés sur l’Algérie. Son dernier roman, Houris, récompensé par le Prix Goncourt, aborde la condition des femmes en pleine effervescence islamiste et guerre civile, une période marquée par des milliers de morts. Le résultat est un roman poignant de 475 pages, écrit comme un acte d’accusation dans un pays où il ne fait pas bon vivre, surtout pour les femmes, les plus exposées aux abus et aux injustices, dont le seul recours semble être l’exil.
L’édition 2024 de ce Prix Goncourt a également eu la particularité de voir le jury, dans lequel siège le Marocain Tahar Ben Jelloun, hésiter entre Kamel Daoud et un écrivain rwandais, Gaël Faye, qui traite également dans son livre Jacaranda de la guerre entre Hutus et Tutsis. En fin de compte, Gaël Faye a reçu le Prix Renaudot, considéré comme une distinction de consolation mais ayant également un fort impact.
Cette année, la preuve est faite que la politique a pris le dessus sur la littérature de bons sentiments et de thèmes sociétaux pour privilégier des œuvres ancrées dans des conflits et des histoires qui risquent d’user rapidement l’intérêt des lecteurs au moment des
choix en librairie.
Par Jalil Nouri
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