Depuis son investiture, le président algérien Abdelmadjid Tebboune s’emploie à faire des annonces spectaculaires dans un contexte économique et social tendu. Bien que ces déclarations semblent répondre à un besoin de regagner la confiance de son peuple, elles peinent souvent à dépasser le stade de la promesse, accentuant le décalage entre les aspirations annoncées et la réalité du terrain.
L’allocation touristique : une promesse gelée
Le 8 décembre 2024, Abdelmadjid Tebboune avait frappé un grand coup lors d’un Conseil des ministres. Il annonçait une réforme ambitieuse : l’allocation touristique, fixée depuis 1997 à un montant symbolique, devait être multipliée par sept fois et demie, passant à 750 euros pour les adultes et 300 euros pour les mineurs dès janvier 2025.
Cependant, cette promesse s’est rapidement heurtée à un mur administratif. En l’absence de directives claires, de décrets d’application ou d’un cadre légal précis, les banques algériennes refusent de délivrer la nouvelle allocation. Pire encore, elles ont gelé l’ancienne allocation, plongeant les voyageurs dans l’embarras.
La confusion a poussé la population à se tourner massivement vers le marché parallèle des devises, aggravant la hausse des taux sur ce marché informel et creusant davantage l’écart avec le cours officiel. Cette situation met en lumière une paralysie institutionnelle, symptomatique d’une gestion improvisée et déconnectée des réalités économiques.
Des promesses mirobolantes pour le secteur du cinéma
Le 19 janvier 2025, lors d’une rencontre avec des professionnels du cinéma, Tebboune a une nouvelle fois sorti l’artillerie lourde. Il a promis des subventions à 100 % pour la réalisation des films, des bourses d’études à l’étranger pour les étudiants de ce secteur, ainsi que des terrains gratuits et des financements pour construire des complexes cinématographiques dans les grandes villes d’Algérie.
Mais ces annonces, faites sans une étude approfondie des impacts et des enjeux, soulèvent de nombreuses questions. Si Tebboune affirme que « l’argent n’est plus un problème », la seule condition pour bénéficier de ces largesses est de ne pas nuire à sa présidence, une exigence qui limite considérablement la liberté d’expression artistique.
Une stratégie d’image au détriment de l’efficacité
À travers ces déclarations, Tebboune cherche avant tout à renforcer son image auprès d’un peuple confronté à des conditions de vie précaires. Ces promesses visent à détourner l’attention des Algériens de la misère sociale et économique, mais elles risquent d’aggraver la frustration populaire lorsqu’elles ne sont pas tenues.
En réalité, les défis structurels du pays – notamment la gestion des devises, l’absence de transparence administrative et le manque d’investissements stratégiques – restent intacts. L’absence de suivi et d’exécution des promesses fragilise davantage la crédibilité du président et de son administration.
Une population en quête de solutions réelles
Les promesses d’Abdelmadjid Tebboune se multiplient à mesure qu’il s’adresse aux Algériens, toujours sur le même ton : « L’argent n’est plus un problème. » Que ce soit dans les secteurs de la santé, de l’enseignement, de la culture, du sport ou d’autres domaines, le président répète inlassablement ce discours. Pourtant, cette rhétorique contraste violemment avec la réalité quotidienne de la majorité de la population, qui continue de vivre dans une grande précarité.
Cette déconnexion entre les paroles et les actes met en lumière les dysfonctionnements profonds du système algérien, où les effets d’annonce se substituent à des réformes concrètes. Si ces promesses permettent à Tebboune de maintenir une illusion temporaire auprès d’un peuple en quête de solutions, elles ne suffisent pas à masquer une gouvernance marquée par l’improvisation et l’absence de résultats tangibles.
L’Algérie ne pourra pas se contenter indéfiniment de discours grandiloquents. Il est impératif que les autorités passent à l’action, avec des réformes structurelles et durables capables de répondre aux aspirations légitimes des Algériens. Ce n’est qu’à ce prix que le pays pourra surmonter ses défis et renouer avec une véritable dynamique de développement.
L’avenir incertain des hydrocarbures algériens face à la concurrence internationale
Si Abdelmadjid Tebboune martèle que « l’argent n’est plus un problème » pour l’Algérie, il semble ignorer ou minimiser un paramètre essentiel : la fragilité de la richesse actuelle du pays, largement dépendante des hydrocarbures. Les annonces d’hier de Donald Trump, déclarant un état d’« urgence énergétique » et promettant une augmentation massive de la production pétrolière et gazière aux États-Unis, pourraient bouleverser cet équilibre.
En réaffirmant sa volonté de « forer à tout-va » et de revenir sur les mesures climatiques adoptées sous l’administration Biden, Trump amorce une stratégie qui pourrait faire chuter les prix du pétrole et du gaz à l’échelle mondiale. Pour l’Algérie, un tel scénario signifierait une diminution drastique des revenus tirés des exportations d’hydrocarbures, qui représentent plus de 90 % des recettes en devises du pays.
Ainsi, les promesses de Tebboune, financées par les revenus actuels des hydrocarbures, risquent de s’effondrer face à une telle réalité économique. La dépendance de l’Algérie à une rente énergétique volatile expose le pays à une crise de liquidités imminente, si les prix mondiaux venaient à baisser.
Plutôt que de multiplier les effets d’annonce, le président algérien ferait mieux de préparer l’avenir en diversifiant l’économie et en investissant dans des secteurs porteurs, afin de réduire la dépendance du pays à cette richesse éphémère. Sans une telle vision stratégique, les annonces spectaculaires d’aujourd’hui pourraient rapidement se transformer en désillusions pour le peuple algérien, condamné à continuer de vivre dans une précarité accrue face à une économie en déclin.
L’urgence pour Tebboune n’est pas seulement de calmer les tensions sociales par des discours, mais de bâtir une économie résiliente, capable de survivre aux aléas des marchés internationaux. Faute de quoi, l’illusion de la richesse actuelle pourrait s’éteindre aussi vite qu’elle s’est imposée.
Par Salma Semmar
Depuis le départ de la France en 1962 ce département algérien n’a pas su se constituer en une Nation et un État
Un groupe de caporaux qui gèrent cette région comme s’il c’était une caserne