Un nouvel épisode tendu s’ajoute à la confrontation numérique croissante entre le Maroc et l’Algérie, marquant une escalade sans précédent dans une guerre de l’ombre où les attaques ne se comptent plus. Après la fuite massive de données touchant la CNSS et le ministère de l’Emploi marocain, attribuée à un hacker se revendiquant algérien, un collectif de pirates informatiques marocains est passé à l’action dans la nuit du 9 au 10 avril.
Le site officiel de la Mutuelle Générale de la Poste et des Télécommunications (MGPTT) en Algérie a été infiltré et paralysé, et plus de 13 Go de données sensibles ont été exfiltrées et publiées. Le groupe, qui signe sous les noms de “Phantom Atlas”, “Phantom Morocco” et “Moroccan Cyber Forces”, a revendiqué cette attaque comme une riposte directe au piratage subi par les institutions marocaines.
Une démonstration de force technologique et politique
Dans un message multilingue diffusé sur Telegram, les hackers marocains justifient leur action comme étant “calculée, ciblée et disproportionnée”, avertissant que toute provocation future entraînera une réponse encore plus sévère. Le message contient également des affirmations à portée géopolitique, notamment sur le Sahara marocain, qualifié de “non-négociable”, soulignant que cette opération est autant un acte politique qu’une démonstration technologique.
Le groupe affirme également avoir accédé à des fichiers internes du ministère algérien du Travail, pointant la fragilité des systèmes numériques de l’État algérien. Cette opération, menée en moins de 24 heures, aurait été rendue possible par l’exploitation de failles basiques et d’identifiants facilement accessibles, selon des experts.
Des failles systémiques exploitées
L’expert en cybersécurité Saxx, reconnu pour son suivi des affrontements numériques régionaux, a confirmé la gravité de la brèche :
« Il devient courant de voir les identifiants de connexion de salariés circuler sur le darknet, et c’est ce type de négligence qui alimente ce genre d’opérations. »
Il pointe du doigt des lacunes structurelles graves dans les systèmes d’information en Algérie, rejoignant les accusations des pirates eux-mêmes dans leur manifeste évoquant la « mauvaise gestion chronique » au sein des institutions ciblées.
Silence des autorités, agitation dans l’ombre
Malgré l’ampleur de cette attaque, aucune réaction officielle n’a encore été enregistrée du côté algérien ou marocain. La seule voix qui s’est exprimée est celle du président de la CNDP (Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel) au Maroc. La DGSII, relevant de l’Administration de la Défense, reste jusqu’ici muette, laissant le champ libre à des acteurs numériques non étatiques de plus en plus actifs et politisés.
Ce mutisme institutionnel, face à des actions de plus en plus spectaculaires, illustre une perte de contrôle progressive sur la guerre numérique en cours, où la frontière entre cyberactivisme, représailles et cyberguerre devient floue.
Plus qu’un simple piratage, cette attaque illustre un bras de fer numérique géopolitique, où l’honneur national, la souveraineté et les données sensibles deviennent les nouveaux terrains de bataille.