Une polémique enfle dans les milieux artistiques et sur les réseaux sociaux autour de concerts annoncés en hommage à Naïma Samih, figure légendaire de la chanson marocaine, décédée le 8 mars dernier. À l’origine de la controverse : l’indignation publique de son fils, Chems-Eddine Belkaid, qui dénonce l’organisation d’événements commerciaux utilisant le nom et l’image de sa mère sans son accord ni celui de la famille.
Dans un communiqué publié sur sa page Facebook officielle, Chems-Eddine ne mâche pas ses mots :
« Nous confirmons que nous prendrons toutes les mesures juridiques nécessaires pour protéger ses droits et sa considération (…) pour tout hommage organisé sans notre accord. »
L’avertissement intervient après la publication, sur les réseaux sociaux, d’affiches annonçant un concert en France en hommage à la regrettée chanteuse, prévu pour ce mois d’avril. L’événement, assorti d’une billetterie payante, n’a fait l’objet d’aucune concertation avec les ayants droit, ni de demande d’autorisation officielle. Ce flou juridique et moral n’a pas tardé à susciter l’indignation.
Une source proche de la famille, citée par Hespress, précise que Chems-Eddine Belkaid n’est pas opposé aux hommages en soi, à condition qu’ils soient organisés dans le respect de la mémoire de sa mère, dans un cadre légal et digne de son statut de monument de la musique marocaine. Le nom de Naïma Samih, rappelle-t-il, n’est pas une marque commerciale libre d’usage, mais le symbole d’un héritage artistique précieux.
Un hommage… ou un business ?
Si l’émotion autour du décès de Naïma Samih est toujours vive, certains organisateurs semblent l’avoir rapidement monnayée. L’annonce précipitée d’événements sans validation de la famille, et avec vente de billets au public, soulève une question dérangeante : s’agit-il d’un véritable hommage ou d’une opération lucrative surfant sur la vague de l’émotion collective ?
L’absence de transparence, le silence des organisateurs et l’opacité autour de l’affectation des recettes ne font que renforcer ce malaise. Le respect dû aux grandes figures culturelles, même disparues, ne devrait pas être subordonné à des intérêts commerciaux.
Ce n’est pas la première fois que des hommages posthumes sont récupérés à des fins financières, souvent sans contrepartie ni pour la famille, ni pour des causes associées. Dans le cas présent, il est permis de penser que le but premier de ces concerts n’est pas tant de saluer la mémoire d’une voix inoubliable que de profiter, au plus vite, de la notoriété et de la nostalgie qu’elle suscite.
La mémoire d’une artiste aussi emblématique que Naïma Samih mérite bien plus que des initiatives improvisées et motivées par des intérêts commerciaux. Elle appelle au respect, à la concertation avec ceux qui lui étaient proches, et à une reconnaissance authentique de son apport inestimable à la chanson marocaine. Mais s’il fallait vraiment lui rendre hommage, c’est de son vivant que cela aurait eu le plus de sens et de valeur. Aujourd’hui, ces tentatives d’hommage posthume sans autorisation, déguisées en manifestations culturelles, s’apparentent trop souvent à une entreprise de marchandisation d’un héritage sacré. Derrière les élans apparents d’admiration, on devine surtout une course aux profits, bien loin de l’esprit de gratitude que méritait une voix aussi précieuse.
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