Alors que les résultats de la deuxième session du baccalauréat 2025 viennent d’être annoncés, le Maroc peut se réjouir d’un taux de réussite global de plus de 66 %, légèrement inférieur à celui de la première session mais révélateur d’un bon niveau général. Parmi les lauréats, plusieurs élèves se sont illustrés par des résultats exceptionnels, suscitant à la fois admiration et interrogation sur l’avenir de ces jeunes talents.
Hiba Bennani a ainsi obtenu une moyenne impressionnante de 19,61/20 en sciences physiques, égalée par Omar El Hariri en mathématiques. Malak affiche un 19,59 en physique, tandis que Mohamed Taha Ayouch atteint 19,42 dans la même spécialité. Une longue liste de brillants bacheliers suit, avec des moyennes dépassant souvent les 18,80. Une génération prometteuse, vouée à intégrer les plus grandes écoles, notamment en France, qui n’hésitent pas à ouvrir grand leurs portes à ces profils d’excellence.
Mais cette réussite pose une autre question : que deviennent ces « as » une fois leur diplôme en poche ? Le risque d’exil académique et professionnel est bien réel. Ces étudiants, formés dans les établissements publics marocains, partent souvent poursuivre leurs études supérieures à l’étranger, notamment dans des écoles françaises, suisses, canadiennes ou encore allemandes. Le Maroc, qui a investi dans leur formation initiale, voit alors ses talents s’évaporer au profit d’autres économies plus attractives.
Au-delà des chiffres et des performances individuelles, il est essentiel d’analyser les causes profondes de cette fuite des talents. Le Maroc souffre encore de l’absence de filières d’excellence locales capables d’offrir aux meilleurs bacheliers une formation de haut niveau, équivalente à celle des grandes écoles étrangères. Cette carence pousse les élèves brillants à s’exiler, souvent avec l’assentiment — voire l’encouragement — de leurs familles, qui considèrent les études à l’étranger comme un investissement pour l’avenir. Par ailleurs, aucune stratégie nationale ne semble exister pour accompagner ces lauréats après l’obtention du bac. Ni mentorat, ni programme de valorisation ou d’intégration dans des projets de recherche ou d’innovation ne leur sont proposés, ce qui renforce le sentiment que leur avenir est ailleurs. Il devient donc urgent d’inverser cette logique en créant des pôles d’excellence et des mécanismes de rétention capables de garder ces esprits brillants au service du pays.
Car chaque année, le même débat resurgit sans qu’aucune réponse concrète ne vienne stopper cette hémorragie de compétences. Il ne suffit pas d’applaudir les résultats de ces jeunes prodiges ; encore faut-il leur offrir un avenir à la hauteur de leur potentiel, ici, au Maroc.
Par Salma Semmar