La solidarité avec la cause palestinienne ne semble plus pouvoir s’exprimer librement en Algérie. C’est en tout cas ce que suggère la décision prise par le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales, qui vient de refuser une demande émanant de plusieurs partis politiques pour organiser une grande marche populaire à Alger en soutien au peuple palestinien. L’interdiction, officialisée par un document signé du secrétaire général Mahmoud Djamaâ, a été adressée à un collectif de formations, dont le Rassemblement Espoir de l’Algérie (TAJ), le Parti des Travailleurs et le Mouvement de la Société pour la Paix.
Prévue pour les 7 ou 8 août sous le mot d’ordre « L’Algérie avec la Palestine… contre la famine et le déplacement », cette manifestation devait illustrer un large soutien populaire à la cause palestinienne. Mais au lieu d’un feu vert, le ministère a invité les organisateurs à se contenter de « rassemblements solidaires » dans des espaces clos, en se référant à la loi 89-28 régissant les réunions et marches publiques.
La décision a immédiatement déclenché un tollé dans les milieux de l’opposition. Walid Kebir, militant politique et figure médiatique critique du régime, a dénoncé un « double discours » de la part des autorités. Sur sa page Facebook, il a pointé une contradiction flagrante entre le slogan officiel du pouvoir « Avec la Palestine, qu’elle ait tort ou raison » et l’interdiction faite aux citoyens d’exprimer pacifiquement leur soutien.
Kebir va plus loin : selon lui, les autorités redoutent toute forme de mobilisation populaire, même sur des thèmes consensuels, par crainte de débordements ou de slogans hostiles au régime, voire critiques envers ses alliés internationaux. Il rappelle à ce titre que l’article 52 de la Constitution algérienne de 2020 garantit la liberté de manifestation pacifique sur simple déclaration, sans nécessiter d’autorisation préalable. Une disposition que la loi actuelle sur les manifestations n’intègre toujours pas, faute de réforme.
En refusant une marche pourtant dédiée à la cause palestinienne, le pouvoir algérien révèle une peur latente : celle de voir une manifestation solidaire se transformer en tribune de contestation intérieure. Derrière les discours enflammés de soutien aux causes justes se cache une stratégie de verrouillage du terrain politique, où toute mobilisation populaire est perçue comme une menace potentielle au régime. Ce choix de l’étouffement préventif en dit long sur les priorités du système en place : préserver son autorité, quitte à sacrifier les principes qu’il brandit haut sur la scène internationale.