Depuis la pandémie de Covid-19, la presse écrite marocaine traverse une crise profonde. Les ventes reculent, les lecteurs désertent et les recettes publicitaires s’effondrent, signant peut-être la fin d’une époque où le journal papier régnait en maître dans les kiosques.
Certains titres survivent encore grâce à un noyau de fidèles lecteurs, aux subventions de l’État et au soutien de quelques annonceurs, mais cette fragile respiration ne saurait masquer l’inéluctable : la presse papier s’essouffle, acculée par une équation financière intenable.
Cette crise n’est pas propre au Maroc. Partout dans le monde, les journaux ont perdu du terrain face à la presse électronique et aux réseaux sociaux. Mais au Maroc, la situation est aggravée par une double contrainte : un lectorat limité et un marché publicitaire de faible envergure. Les annonceurs, de plus en plus attirés par le digital, ont déserté les pages imprimées pour investir dans le web, jugé plus rentable et mieux ciblé.
À cela s’ajoute le coût croissant du papier et de l’impression, qui alourdit les charges des rédactions, déjà fragilisées. De plus, la crédibilité de certains titres a été mise en cause, une partie du public jugeant leur contenu peu attractif ou trop institutionnel. Cette perte de confiance a renforcé le virage vers les plateformes numériques, où l’information est gratuite et instantanée.
Pourtant, des tentatives de réinvention existent : certains journaux ont développé des versions numériques payantes, des newsletters, des podcasts, ou encore des produits événementiels. Mais ces initiatives restent timides et peinent à compenser la chute des ventes papier.
La disparition progressive de la presse écrite pose aussi un enjeu démocratique majeur. La pluralité des opinions et la profondeur d’analyse, longtemps garanties par les journaux traditionnels, risquent de céder la place à des contenus courts et superficiels dominés par les réseaux sociaux.
Aujourd’hui, la question est claire : la presse papier marocaine vit-elle ses dernières heures ou saura-t-elle se réinventer ? Le salut passera sans doute par un équilibre entre modernisation, indépendance éditoriale et fidélisation de nouveaux lecteurs. Mais le temps presse.
Par Salma Semmar