Walid Regragui avance vers la Coupe d’Afrique des Nations avec un paradoxe déroutant : il aligne les records, mais voit son capital sympathie fondre comme neige au soleil. Auteur d’une série historique de 17 victoires consécutives avec les Lions de l’Atlas, un record au niveau mondial, le sélectionneur marocain reste pourtant au cœur d’un procès permanent sur la place publique. À cinq semaines du coup d’envoi d’une CAN à domicile, la « vox populi » doute plus que jamais de celui qu’elle avait porté aux nues après l’épopée du Mondial 2022.
Dans les cafés, sur les réseaux sociaux et jusque dans les tribunes, un même discours domine : au moindre faux pas lors de la compétition, une partie des supporters réclamera sa démission, voire son remplacement en plein tournoi, de peur de voir s’envoler le rêve d’un premier sacre continental au pays. Pour beaucoup, Regragui n’aurait plus qu’une seule issue : gagner tous les matchs et soulever la coupe pour sauver son siège. Dans le cas contraire, un véritable séisme populaire et sportif pourrait éclater.
À cela s’ajoutent deux éléments qui nourrissent ce désamour grandissant. D’abord, la gestion des stars, Ziyech, Amrabat, En-Nesyri, ainsi que certains choix tactiques jugés trop prudents divisent les supporters, qui reprochent au coach de ne pas exploiter pleinement la richesse exceptionnelle de l’effectif. Ensuite, l’épopée du Mondial 2022 a placé la barre très haut : chaque performance est désormais comparée à l’exploit qatari, créant un fossé entre résultats actuels — pourtant excellents — et attentes émotionnelles surdimensionnées.
Dans ce climat électrique, Regragui évolue sous une pression extrême, susceptible d’empoisonner la préparation et de peser sur le moral du groupe. Si les joueurs jugent injustes les critiques répétées contre leur entraîneur, la crispation n’est pas à exclure. Tout cela intervient alors que les blessures continuent de perturber les plans du sélectionneur et de nourrir un sentiment de mauvaise fortune.
Organiser la CAN est, enfin, un couteau à double tranchant : jouer à domicile donne un avantage certain mais impose une responsabilité immense. Un triomphe ferait entrer Regragui dans l’histoire ; un échec serait vécu comme un affront national.
En conférence de presse, le sélectionneur apparaît parfois comme un homme lassé de devoir justifier sans cesse ses choix et demander simplement qu’on le laisse travailler. Si le désamour continue de s’amplifier, il pourrait s’y perdre. À lui de garder sa boussole et son cap, contre vents et marées, pour réconcilier résultats, jeu… et opinion publique.










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