Les chiffres relatifs au phénomène du mariage des mineures ont été révélés au Parlement par le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi. Le nombre de mariages impliquant des filles mineures s’est établi à 8.900 en 2024, contre près de 27.000 en 2017, une baisse notable mais qui confirme la persistance préoccupante du phénomène, en particulier en milieu rural, où des traditions profondément enracinées continuent de s’opposer à l’esprit de la loi.
Les demandes d’autorisation judiciaire enregistrées dans les zones rurales demeurent trois à quatre fois supérieures à celles déposées en milieu urbain. Elles concernent souvent des situations de grossesses non désirées ou résultent de choix imposés par un patriarcat encore dominant, renforcé par des coutumes sociales dont il reste difficile de se détacher.
Le ministre appelle à une véritable campagne nationale de sensibilisation afin de combattre ces pratiques qui portent atteinte aux droits fondamentaux des enfants. Pourtant, le silence qui entoure cette question demeure troublant. Le cinéma marocain, malgré sa tradition d’engagement social, n’a que rarement osé aborder de front ce sujet tabou, pourtant riche de drames humains et de récits bouleversants. Dans certaines mosquées également, le thème reste délicat, voire traité comme un fait social “naturel”, certains n’hésitant pas à le justifier au nom d’une supposée cohésion sociale.
Derrière ces chiffres se cachent pourtant des drames déchirants : des filles parfois âgées de 12 ou 13 ans, mariées dès la puberté, contraintes d’assumer prématurément des responsabilités d’adultes. Beaucoup de ces unions se soldent par des divorces précoces, invoquant l’incapacité de ces adolescentes à gérer un foyer ou à répondre aux exigences d’époux bien plus âgés, souvent sans la moindre considération pour l’âge ou la vulnérabilité de leurs partenaires.
La violence, nourrie par l’incompréhension et les écarts d’âge pouvant atteindre plusieurs décennies, ternit l’image d’une société qui, trop souvent, assiste passivement au sacrifice de ses jeunes filles, au mépris de leur dignité et de leur droit à l’enfance.
Par Jalil Nouri










Contactez Nous