Les crues meurtrières qui ont frappé Safi, avec un lourd bilan humain et matériel, ont remis au premier plan une question que le discours public effleure souvent sans la traiter de front : au Maroc, toutes les villes ne sont pas protégées ni gérées à la même enseigne. Selon les autorités relayées par plusieurs médias, ces intempéries ont provoqué des dizaines de morts et des dégâts considérables, au point de déclencher enquêtes et mesures d’urgence.
Ce drame résonne comme un réveil tardif face à une évidence : la réduction des disparités territoriales, régulièrement rappelée au plus haut niveau, n’est pas une formule. C’est une exigence de sécurité, de dignité et de justice urbaine. Lorsque des rues se transforment en torrents, que des habitations sont envahies, que l’activité s’arrête et que des vies basculent en quelques minutes, la vulnérabilité n’est plus un concept, elle devient un constat.
La comparaison s’impose alors, parfois brutalement, avec une capitale comme Rabat, souvent citée en exemple pour sa gestion urbaine : entretien des réseaux, assainissement plus efficace, mobilité plus fluide, meilleure planification et qualité de l’espace public. Cet écart n’est pas seulement esthétique ; il se mesure en capacité d’anticipation, en qualité d’exécution, en continuité des projets et en gouvernance. Rabat a bénéficié, au fil des années, d’importants programmes structurants et d’une approche plus intégrée de l’aménagement, ce qui nourrit aujourd’hui l’image d’une ville “pilote” que beaucoup envient.
Mais l’autre Maroc urbain existe aussi : celui des infrastructures saturées, des quartiers fragiles, des constructions à risque, et des alertes ignorées jusqu’à l’accident. Le récent drame de l’effondrement d’immeubles à Fès, qui a coûté la vie à plusieurs dizaines de personnes selon les bilans communiqués, rappelle que la sécurité urbaine ne se limite pas aux épisodes de pluie : elle concerne aussi l’habitat, le contrôle, la prévention et la responsabilité.
Il est temps, donc, de réviser le mode de gestion des villes : méthodes opérantes, reddition des comptes, planification réaliste, entretien régulier, transparence des marchés, et vision d’avenir qui respecte les spécificités de chaque territoire. Et si les remèdes publics continuent d’échouer à corriger l’écart entre villes “vitrines” et villes “oubliées”, le débat, sensible mais nécessaire, d’une gestion déléguée, encadrée et contrôlée, reviendra inévitablement sur la table. Car la prochaine catastrophe, elle, ne demandera pas l’autorisation.
Par Mounir Ghazali











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