À l’approche de la Coupe d’Afrique des Nations, quelque chose s’épaissit dans l’air. Une tension douce, presque électrique, traverse les cafés, les salons, les discussions les plus banales. On pourrait balayer cela d’un revers de main, parler de divertissement, de spectacle, de bruit. Mais ce serait passer à côté de l’essentiel. Si le football occupe une place aussi centrale, ici comme ailleurs, ce n’est pas par hasard. Avant d’être un marché, il est un langage. Simple, universel, profondément humain.
Lorsque je m’installe devant un match, je ne regarde pas simplement vingt-deux joueur et un ballon. Je suis la témoin silencieuse d’une représentation de notre vie.Le terrain, avec ses lignes blanches et ses limites claires n’est autre que notre environnement quotidien,un théâtre où se rejouent, presqueinconsciemment, des rituels de clans et une certaine mémoire virile du territoire.Le but adverse, ce filet tendu devant nous matérialise nos objectifs, ces quêtes qui nous font nous lever le matin. Ce qui se déroule sur la pelouse pendant quatre-vingt-dix minutes est une allégorie clinique de notre combat pour l’existence.
C’est une « mini-vie » en accéléré. J’y vois la nécessité absolue de la stratégie, cette planification mentale que nous tentons tous d’appliquer à nos carrières ou nos projets. J’y vois la beauté du travail d’équipe, où l’individu doit s’effacer pour le collectif, mais aussi la solitude du joueur face à sa responsabilité. Et puis, il y a l’imprévisibles : les coups de chance qui nous sauvent quand tout semble perdu, ou l’injustice d’un faux pas. Sur ce rectangle vert, comme au bureau ou dans la cité, on croise l’éthique et le sabotage, la loyauté et la trahison. On y vit la joie pure de la victoire et l’amertume de la défaite. Nous nous y retrouvons tous car le football condense, dans une unité de temps et de lieu, toute la palette des émotions et des dynamiques humaines.
Au Maroc, cette dimension prend une couleur particulière. Au-delà du réflexe nationaliste, nous avons cette singularité rare : un Roi, Sa Majesté Que Dieu L’assiste,qui a su utiliser le football non pour exalter la victoire, mais pour transmettre des valeurs profondément marocaines. Lorsque les mères des joueurs ont été placées au cœur de la célébration, ce n’était pas un geste de communication. C’était un rappel discret mais puissant ; derrière chaque performance, il y a une transmission silencieuse, un lien affectif qui précède le succès. Et lorsque Sa Majesté, Que Dieu L’assiste, est descendu lui-même dans la rue pour célébrer avec le peuple, sans distance ni mise en scène excessive, il a incarné une autre valeur essentielle ; celle du partage, d’une joie vécue ensemble, à hauteur d’homme.
C’est là que réside la véritable force de l’événement qui s’annonce. Nous ne sommes pas seulement en train de préparer des matchs ; nous avons l’opportunité d’utiliser ce jeu pour « installer » une culture. En nous inspirant de ces gestes forts, nous pouvons faire de la CAN un moment de transmission. Il ne s’agit plus seulement de marquer des buts, mais de marquer les esprits par la bienveillance et le lien.
Le football nous offre ce prétexte magnifique, celui de transformer une passion commune en un ciment durable. Si nous parvenons à regarder notre équipe non seulement comme des héros sportifs, mais comme les porteurs d’un idéal de solidarité et de respect, alors la victoire sera acquise avant même le coup de sifflet final. Car au fond, l’objectif ultime, sur le terrain de la vie comme sur celui du stade, reste de faire société ensemble.
Par Meriem SMIDI










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Bravo ma chère petite nièce, félicitant ensemble la naissance d’une grande écrivaine🫶