La France avait choisi de mettre fin aux opérations Serval et Barkhane , officiellement car la menace Djihadiste avait été anéantie sauf que curieusement la sécurité des forces françaises n’était pas garantie.
Dans les faits, l’armée française avait concédé un lourd tribut en pertes de soldats et le prix à payer en cadavres renvoyés en France n’était plus soutenable politiquement pour Paris.
Le Djihadisme au Sahel comme alibi !
Les relations entre la France et le Mali s’étaient fortement détériorées depuis que des colonels ont pris le pouvoir par la force à Bamako en août 2020. La junte avait alors poussé les forces françaises vers la sortie en 2022, neuf ans après le déclenchement de l’opération Barkhane.
S’agissant du Burkina Faso, les relations avec la France se sont dégradées depuis l’arrivée au pouvoir par un coup d’État en septembre 2022 du capitaine Ibrahim Traoré.
Aujourd’hui, Emmanuel Macron se voile effrontément la face et dans un entretien accordé le 23 aout à nos collègues de Le Point , il se félicitait et se disait très satisfait des actions menées par l’armée française.
Emmanuel Macron estime ainsi que les interventions françaises au Sahel « ont été des succès » malgré les crises successives .
« Si nous ne nous étions pas engagés, avec les opérations Serval puis Barkhane, il n’y aurait, sans doute, plus de Mali, plus de Burkina Faso, je ne suis même pas sûr qu’il y aurait encore le Niger. Ces interventions françaises ont empêché la création de califats à quelques milliers de kilomètres de nos frontières. Il y a, certes, une crise politique dans beaucoup de pays d’Afrique de l’Ouest. Et quand il y a un coup d’Etat et que la priorité des nouveaux régimes n’est pas de lutter contre le terrorisme, la France n’a pas vocation à rester engagée. C’est, il est vrai, dramatique pour les Etats concernés », a estimé Emmanuel Macron.
Si la France tenait vraiment à voir la démocratie se développer au Sahel, elle aurait agi différemment sauf qu’elle a préféré retirer son armée comme l’ont fait les américains en Irak et en Afghanistan sans aucune garantie de transition démocratique !
L’aveuglement de l’Élysée et l’échec diplomatique au Sahel ne sauraient toutefois être occultés par le président français car si la France s’est longtemps crû en terrain conquis, aujourd’hui ce n’est plus le cas et reconquérir le terrain dans un climat de perte d’influence de Paris .
Et puis, on a du mal à croire le président français lorsqu’il prétend que sans la France ces trois pays auraient disparu, alors que dans les faits cela arrangerait les intérêts de Paris !
Pour résumer , il n’ y a rien de plus juste que les récentes déclarations de Bernard Cazeneuve au sujet de la politique du président français : « L’art de gouverner ne peut pas se réduire à un exercice pyrotechnique et solitaire »!
Maintenant pour les derniers rebondissements, vendredi en soirée, le régime au pouvoir à Niamey lançait un ultimatum de 48 h à l’ambassadeur de France pour qu’il quitte le pays. Une injonction aussitôt rejetée par le Quai d’Orsay qui dit ne pas reconnaître les putschistes et que ces derniers n’ont pas autorité à lancer de tels ultimatums .
Une chose est sûre : lorsque l’ambassade de France sera encerclée par les militaires à la fin de l’ultimatum , l’escalade sera inévitable et pourrait mener à un bain de sang à Niamey !
Il faut dire qu’en cas d’agression contre le Niger , les forces du Mali et du Burkina Faso ont été autorisées et seront prêtes le cas échéant car les militaires au pouvoir autorisent le Burkina Faso et le Mali à intervenir sur leur sol « en cas d’agression » !
Ces pays voisins du Niger ont de nouveau mis en garde la Cedeao contre toute intervention militaire à l’encontre des putschistes qui ont renversé le président Bazoum le 26 juillet.
Entre-temps, des proches du président déchu avaient affirmé que la France était autorisée à intervenir pour le délivrer et que Paris avait exigé une autorisation écrite.
Si les chefs d’états de la CEDEAO avaient annoncé que la date d’une intervention militaire avait été fixée, la France pourrait pour sa part se résoudre à une opération commando comme elle l’avait fait pour assassiner Kadhafi mais tant qu’elle ne le fait c’est que le Pentagone voit d’un très mauvais œil et s’oppose carrément à toute intervention.
La Maison Blanche n’en a pas fini effectivement de souffler le chaud et le froid , en déclarant tantôt qu’il n’était pas question de mettre fin à la coopération militaire avec Niamey, tantôt en semant le doute , le flou et l’ambiguïté quant à un futur rôle du Pentagone dans la région !
Dans tous les cas , Washington a des contacts permanents avec les putschistes , à travers le nouveau chef d’état-major !
La France avait-elle besoin d’une autorisation pour intervenir au Niger !? Mais de qui !?
C’est nouveau et inédit comme situation.
La France aurait plutôt et certainement besoin de l’autorisation de la Maison Blanche, mais comme l’orgueil d’Emmanuel Macron et la fierté de la superpuissance française ne supporteraient pas de devoir attendre l’aval dés Etats Unis, il faut bien sauver les apparences !
Mais tout de même pourquoi ne pas lancer un pavé dans la mare ou plutôt une bouteille à la mer pour voir la réaction des américains.
Sinon, l’armée française aurait déjà fait le boulot mais comme le terrain est miné, la France a tout fait pour envoyer une force de la CEDEAO…
C’est ce qu’on appelle de l’aventurisme très cavalier pour des va-t’en guerre !
On est certainement en train d’assister au déclin de la France et la perte d’influence de Paris promet de faire des étincelles !
Quelques jours avant sa prétendue disparition , comme son corps n’a pas encore été identifié , Prigogine avait appelé à libérer l’Afrique et nul doute que ce qui va se passer au Sahel n’est ni plus ni moins qu’une guerre de libération !
A ce sujet , le spectre de Prigogine planera certainement encore très longtemps dans cette région du Sahel !
Depuis le début de la guerre en Ukraine, la France a expédié des cargaisons énormes d’armes vers le front contre la Russie, à une cadence beaucoup plus soutenue que celle avec laquelle elle pourrait produire des armements.
Si la France voulait vraiment défendre sa présence et ses intérêts au Sahel, n’aurait -elle pas dû garder toutes ses forces et ses munitions dans cette région au lieu de faire la guerre à la Russie et laisser le champ libre au Mali aux milices de Wagner, ou du moins ce qu’il va en rester !?
D’après de très nombreux experts militaires, l’armée française serait incapable aujourd’hui comme à moyen terme de relever le défi d’un conflit en Europe, ou justement aux frontières avec la Russie.
Et la région du Sahel, reste le seul terrain où l’armée française peut encore se déployer, quoique à ses risques et périls.
Depuis les évènements du 11 septembre, l’alibi du Djihadisme et le prétexte de la prétendue lutte contre la terrorisme ont longtemps jalonné la géopolitique du chaos poursuivie par les grandes puissances
Et aujourd’hui, dans beaucoup de régions du monde les barils de pétrole cohabitent allègrement avec les barils de poudre et les bombes , et dans les régions où les richesses du sous-sol sont énormes on ne peut s’empêcher de constater que les djihadistes surgissent de sous – terre comme des champignons .
C’est exactement le cas au Sahel et au Nigeria, avec Boko Haram..
Flagrant déni
Pour terminer, comment le président français peut-il persister , dans un flagrant déni , dans son entêtement à privilégier le prisme de la puissance coloniale en faisant abstraction du rôle des puissances régionales que sont le Maroc et à un degré moindre le voisin algérien !?
Oui car entre-temps, la France n’a rien trouvé de mieux que de se brouiller avec le Maroc et d’empoisonner encore plus ses rapports avec l’Algérie même si cela n’est absolument pas notre problème ni notre priorité !
A propos de l’Algérie, il y a dix jours cette dernière prétendait que le pouvoir des généraux avait refusé l’ouverture de son espace aérien comme l’aurait réclamé la France pour une éventuelle intervention militaire au Niger et que le Maroc se serait empressé de proposer ses services.
Le Quai d’Orsay n’a même pas pris la peine de répondre à de telles sornettes qui font partie des mesquineries du pouvoir algérien qui n’a rien trouvé d’autre pirouette comme volte-face pour détourner l’attention après le camouflet des Brics qui ont rejeté la candidature d’Alger !
La deuxième » Algérie française » serait-on tentés de dire car apparemment , contrairement à ce que rapporté , les généraux n’attendent qu’un signal de Paris pour prêter main forte à l’armée française au prix d’un marchandage secret et des plus mesquins !
Par Hafid FASSI FIHRI