Alors que le Maroc compte près de 26 millions de clients bancaires, l’usage de la carte bancaire reste encore très limité, et la bancarisation plafonne à environ 50 % de la population. Deux obstacles majeurs continuent d’entraver l’inclusion financière : l’analphabétisme et le manque de confiance dans les institutions bancaires. À ceux-là, il faut ajouter le déficit d’infrastructures en zones rurales et l’absence d’éducation financière généralisée.
L’analphabétisme, qui touche encore près d’un tiers des Marocains, constitue un frein structurel. Une part importante de la population ne sait ni lire ni écrire, et se retrouve incapable de comprendre les démarches bancaires, les contrats, ou même les fonctionnalités de base d’un guichet automatique. Ce phénomène est souvent lié à la pauvreté, renforçant ainsi la double peine : exclusion sociale et financière.
À cela s’ajoute une méfiance ancrée dans les traditions populaires, où l’on préfère épargner à domicile plutôt que de confier ses économies à une banque perçue comme distante, complexe, voire coûteuse. Les frais de tenue de compte et la perception d’une banque réservée aux riches continuent de décourager de nombreuses personnes aux revenus modestes.
Les zones rurales, quant à elles, souffrent d’un manque criant d’infrastructures bancaires. Le faible maillage en agences et en guichets automatiques contraint les habitants à se déplacer sur de longues distances, rendant les services bancaires inaccessibles. La bancarisation territoriale reste inégalement répartie, ce qui creuse davantage le fossé entre zones urbaines et rurales.
L’échec relatif de l’économie solidaire et des institutions de microcrédit à ancrer durablement l’usage bancaire, en particulier chez les femmes, illustre aussi la nécessité de développer une véritable éducation financière. La majorité des citoyens n’ont jamais été formés à la gestion d’un compte, à l’usage sécurisé d’une carte, ou à la compréhension de l’épargne et du crédit. Ce manque de culture financière entretient les préjugés et limite l’adoption de services modernes.
En somme, la carte bancaire et la bancarisation ne pourront progresser significativement qu’à condition de renforcer l’inclusion numérique, d’étendre les services bancaires aux zones éloignées et de construire une relation de confiance avec les citoyens, fondée sur l’écoute, la pédagogie et des offres accessibles.
Par Salma Semmar