Alors que le Maroc fait face à une surpopulation carcérale chronique, une nouvelle page s’ouvre dans la politique pénale du Royaume avec l’entrée en vigueur du dispositif du bracelet électronique, voté et adopté par le Parlement. Une mesure attendue de longue date, qui vise à désengorger les établissements pénitentiaires tout en respectant les droits fondamentaux des condamnés.
Un signal fort dans un contexte critique
À l’occasion de la Fête du Trône, Sa Majesté le Roi Mohammed VI a gracié près de 20.000 détenus, un geste exceptionnellement généreux, motivé en partie par la volonté d’alléger les pressions sur les prisons, où les cellules sont souvent surpeuplées au-delà de leur capacité légale. Cet acte de clémence royale souligne aussi l’urgence d’introduire des alternatives efficaces à la détention, en particulier pour les personnes condamnées pour des délits mineurs ou souffrant de fragilités particulières.
Le bracelet électronique : une alternative crédible
Déjà utilisé dans plusieurs pays européens, le bracelet électronique permet à une personne condamnée de purger sa peine en liberté surveillée, avec obligation de demeurer à son domicile ou dans un périmètre défini à certaines heures. Le système repose sur un dispositif de géolocalisation relié aux services judiciaires, permettant un contrôle en temps réel.
Au Maroc, cette mesure vient répondre à une double exigence : désengorger les prisons tout en maintenant une forme de sanction adaptée, moins lourde mais tout aussi encadrée. Sont concernées en priorité les personnes condamnées à de courtes peines, les malades, les personnes âgées, ou celles présentant des situations sociales ou familiales délicates.
Un cadre légal déjà prêt
Le bracelet électronique a été introduit dans le nouveau Code de procédure pénale en cours de réforme, et figure également dans le plan de modernisation du système judiciaire marocain. Le Parlement a donné son feu vert à cette mesure dans un climat politique favorable, les partis y voyant un outil de justice restaurative, en phase avec les standards internationaux.
Des défis à relever
La réussite de cette réforme dépendra de plusieurs conditions :
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L’infrastructure technologique, pour assurer la fiabilité du dispositif.
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La formation des magistrats, greffiers et forces de l’ordre à cette nouvelle logique pénale.
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L’accompagnement social des bénéficiaires, pour éviter les récidives et favoriser la réinsertion.
De nombreuses voix plaident pour que cette mesure soit mise en œuvre rapidement, en particulier dans les affaires où l’incarcération est contre-productive. C’est le cas des personnes gravement malades, pour qui la prison devient un lieu de souffrance inutile, voire inhumaine.
Un pas vers une justice plus humaine
La mise en place du bracelet électronique marque une évolution notable vers une justice plus intelligente, plus humaine, et moins punitive, sans pour autant être laxiste. Elle est le fruit d’une prise de conscience que l’incarcération ne peut être la réponse unique à tous les délits, surtout lorsque la prison elle-même devient une source de violence, de récidive ou de déshumanisation.
Avec 20.000 détenus graciés et un système de bracelet électronique désormais prêt à être déployé dans les toutes prochaines semaines, le Maroc donne des signes clairs de son engagement vers une justice plus moderne et équilibrée. L’introduction concrète de cette mesure, attendue dans les juridictions pilotes avant une généralisation, confirme que l’objectif n’est pas uniquement de punir, mais aussi de réparer, réinsérer et protéger.
Par Salma Semmar