La scène s’est répétée, au point de ne plus étonner personne. Pourtant, elle touche au cœur de la démocratie représentative : la séance annuelle de vote sur le projet de loi de finances, texte qui fixe les priorités de l’État et conditionne le quotidien de millions de Marocains. Au moment de trancher sur la première partie du budget – celle des ressources –, 175 députés manquaient à l’appel. Le texte n’a été adopté que par 165 voix, soit moins de la moitié des 395 membres que compte la Chambre des représentants.
Au-delà des chiffres, c’est le signal politique qui inquiète. Comment justifier un tel vide dans l’hémicycle, alors que les mêmes élus n’hésitent pas à faire campagne sur la défense du pouvoir d’achat ou la justice sociale ? Malgré les sanctions prévues par le règlement intérieur, les pratiques n’ont pas changé. Même l’introduction de caméras « intelligentes » pour enregistrer entrées et sorties des députés n’aura été qu’un feu de paille : face à la fronde des « parlementaires fantômes », le bureau de la Chambre a reculé.
Cette démission collective ne se limite pas aux votes budgétaires. Séances de questions orales désertées, commissions clairsemées, débats réduits à des joutes stériles : la vie parlementaire semble se vider de sa substance. Le Parlement, censé être l’espace du contrôle et de la reddition des comptes, se transforme trop souvent en scène de buzz, de cris et d’invectives.
Cette dérive renvoie à une crise plus profonde : celle des partis politiques, incapables de produire des élites responsables et de rappeler leurs élus à l’ordre. Tant que les formations continueront à privilégier les « portefeuilles bien garnis » aux profils compétents, le citoyen restera le grand perdant d’un jeu institutionnel où l’absentéisme devient presque une norme tacite.
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