Face à une situation hydrique de plus en plus préoccupante, le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a une nouvelle fois alerté sur les défis liés à la raréfaction des ressources en eau au Maroc. Lors d’une conférence organisée le 10 février par le Club des jeunes juristes à l’Université Internationale de Rabat, il a présenté les mesures prises par le gouvernement pour répondre à cette crise.
Une crise amplifiée par le changement climatique
Le Maroc subit de plein fouet les effets du changement climatique, accentuant la sécheresse persistante qui frappe le pays depuis sept années consécutives. Nizar Baraka a rappelé que la température moyenne a augmenté de +1,8°C, dépassant ainsi la limite de 1,5°C fixée par l’Accord de Paris. Ce réchauffement contribue à une évaporation accrue, atteignant 1,5 million de mètres cubes d’eau par jour.
Autre indicateur préoccupant : la part individuelle en eau, qui était de 2 600 m³ par an dans les années 1960, devrait chuter à 540 m³ d’ici 2040, une baisse qui accentue la pénurie d’eau potable et l’épuisement des nappes phréatiques.
Des infrastructures hydrauliques en renfort
Si les précipitations récentes ont permis une légère amélioration des réserves en eau, avec un taux de remplissage des barrages passant de 23,3% à 27,7%, la situation reste alarmante. Le barrage Al Massira, deuxième plus grand barrage du Maroc, est passé de 100% de remplissage à seulement 1% en dix ans, illustrant la gravité du déficit hydrique.
Pour y remédier, le gouvernement a accéléré la construction de barrages de toutes tailles, afin d’optimiser la gestion de l’eau et d’atténuer les risques liés à la sécheresse et aux inondations. Actuellement, le Maroc dispose de :
- 154 grands barrages et 150 petits et moyens barrages.
- 16 stations de dessalement d’eau de mer, capables de produire 277 millions de m³ d’eau.
- 17 infrastructures de transfert d’eau entre bassins hydrauliques.
Par ailleurs, des travaux sont en cours pour relier les bassins du Loukkos, du Sebou, du Bouregreg et d’Oum Errabia. L’objectif est d’acheminer 1,2 milliard de m³ d’eau par an vers le barrage Al Massira, garantissant ainsi une meilleure répartition des ressources hydriques.
Une nouvelle approche pour mieux gérer l’eau
Pour faire face à cette situation, Nizar Baraka a insisté sur une rupture avec les méthodes traditionnelles de gestion de l’eau. La stratégie actuelle repose sur quatre transformations majeures :
- Passer d’une gestion basée sur les ressources conventionnelles à une approche intégrée, incluant les ressources non conventionnelles (dessalement, réutilisation des eaux usées, captage des eaux pluviales).
- Privilégier la gestion de la demande en eau plutôt que l’augmentation de l’offre, en promouvant un usage plus raisonné des ressources.
- Adopter une vision à long terme, plutôt qu’une gestion réactive et de court terme.
- Instaurer une solidarité inversée, où les villes soutiennent les zones rurales, afin d’assurer une répartition plus équitable des ressources hydriques.
Vers une innovation durable pour sécuriser l’eau
Dans un souci d’optimisation et d’innovation, les stations de dessalement feront l’objet d’études approfondies pour améliorer leur rendement. Le Maroc envisage également d’équiper ses barrages de panneaux solaires flottants, comme c’est déjà le cas sur le barrage de Tanger Med. Cette initiative vise à réduire l’évaporation de l’eau et à produire une énergie propre, tout en garantissant un approvisionnement plus durable.
Enfin, le ministre a insisté sur la nécessité d’un changement de comportement vis-à-vis de la gestion de l’eau, appelant la population à adopter de meilleures pratiques de conservation et à prendre conscience des enjeux climatiques.
Le Maroc, confronté à une crise de l’eau sans précédent, se tourne vers une approche intégrée et durable pour assurer un accès équitable et pérenne aux ressources hydriques, tout en anticipant les défis climatiques à venir.
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