Un nouveau front s’ouvre dans la lutte contre le blanchiment d’argent au Maroc, alors que les services de l’Autorité nationale du renseignement financier (ANRF) ont lancé une série d’enquêtes ciblées dans les villes de Casablanca et Marrakech. Au cœur de ces investigations : des projets immobiliers de type « plateaux bureaux », soupçonnés de servir de couverture à des circuits de financement occultes.
Les soupçons sont nés de signalements émanant de professionnels de l’immobilier, intrigués par la multiplication de projets portés par des investisseurs sans expérience avérée dans le secteur. Selon les sources citées par Hespress, plusieurs de ces promoteurs sont des Marocains résidant à l’étranger (MRE), aux profils atypiques, n’ayant ni formation dans le BTP ni recours à des financements bancaires. Pourtant, ils ont réussi à lancer des projets d’envergure dans des zones où les prix de l’immobilier atteignent des sommets, notamment à Casablanca.
Les contrôles ont rapidement mis au jour de sérieuses anomalies. Certaines sociétés spécialisées dans la location de bureaux affichaient des flux financiers conséquents malgré un taux d’occupation inférieur à 50 %. Les croisements de données avec la Direction générale des impôts (DGI) ont révélé de profonds écarts entre les loyers réellement encaissés et ceux déclarés à l’administration fiscale.
Plus grave encore, les enquêteurs s’intéressent à de possibles connexions entre ces promoteurs et des réseaux de trafic de drogue ou de financement du terrorisme. Selon les informations communiquées, 54 dossiers ont déjà été transmis à la justice, répartis entre les juridictions de Rabat, Casablanca, Marrakech et Fès. Le parquet général près la Cour d’appel de Rabat a également été saisi.
L’année 2024 confirme une tendance préoccupante : l’ANRF a reçu 5 171 déclarations de soupçon de blanchiment d’argent, soit une hausse de près de 54 % par rapport à l’année précédente. Ce pic illustre à la fois une vigilance renforcée des institutions et une prolifération des montages financiers illicites.
Parmi les mécanismes détectés, figure un stratagème impliquant des contrats de location signés à des prix démesurés avec des entreprises dont l’activité ne justifie pas un tel engagement. Ces montages pourraient servir à dissimuler des flux financiers d’origine criminelle. De plus, certains opérateurs détenaient des stocks immobiliers dormants dans des emplacements stratégiques, utilisés comme leviers pour blanchir des fonds en procédant à des ventes rapides en cas de besoin.
Dans un contexte où la transparence économique devient un impératif national et international, ces révélations pourraient accélérer les réformes du secteur immobilier et les obligations de vigilance imposées aux professionnels. Le temps des transactions opaques semble compté.
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Ces réseaux criminels n’ont pas seulement jeter un doute sérieux sur l’origine des fonds investis dans l’immobilier de bureaux, ils ont contribué à défigurer des villes telles que Marrakech, qui s’urbanisent n’importe comment sans contrôle réel.