Après plusieurs mois de tensions diplomatiques marquées par des dossiers sensibles, la visite du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, à Alger le dimanche 6 avril 2025, marque une tentative de réchauffement des relations entre la France et l’Algérie. Un pas symbolique a été franchi, mais la méfiance reste palpable.
Accueilli par le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour un entretien de deux heures et demie, le chef de la diplomatie française a voulu instaurer un dialogue « d’égal à égal », formule répétée de part et d’autre pour signifier une volonté de respect mutuel dans les discussions. Le président algérien, dans une déclaration mesurée, a parlé d’un « rideau qui se lève ». Une métaphore qui en dit long sur l’opacité des échanges précédents, mais qui ne garantit en rien un retour à la normale.
Les relations franco-algériennes ont été fragilisées par une série de dossiers explosifs : le différend autour du Sahara occidental, le sort de l’écrivain Boualem Sansal, récemment condamné à cinq ans de prison malgré une grave maladie, ou encore les crispations sur la question migratoire, notamment les expulsions de ressortissants algériens en situation irrégulière en France. Autant de points de friction qui laissent planer une ombre sur cette reprise du dialogue.
Dans le sillage de cette rencontre, les préfets français doivent échanger cette semaine avec les dix-huit responsables consulaires algériens en France pour examiner le sort de soixante ressortissants algériens que Paris souhaite reconduire vers leur pays d’origine. « Les expulsions sont en train de reprendre », affirme une source gouvernementale française, preuve que les discussions reprennent un tour plus pragmatique, mais sans écarter les tensions latentes.
La visite prochaine du ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, à Alger, axée sur les questions migratoires et la coopération en matière de lutte contre le terrorisme, s’inscrit dans cette dynamique de reprise des échanges. Toutefois, ces déplacements ministériels ne suffisent pas à masquer les profondes divergences.
Jean-Noël Barrot a également plaidé pour un « geste de clémence » en faveur de Boualem Sansal, écrivain emblématique dont l’état de santé se détériore à cause d’un cancer. Il a suggéré une grâce présidentielle ou un sursis humanitaire. Pour l’heure, aucune réponse officielle n’a été communiquée, illustrant les limites de l’influence diplomatique française face à un pouvoir algérien attaché à sa souveraineté judiciaire.
Si le dialogue est de retour entre Paris et Alger, le chemin vers une relation sereine et stable reste semé d’embûches. Les enjeux profonds et les blessures historiques rendent illusoire toute idée de « normalité retrouvée ». La prudence demeure de mise, car au-delà des sourires et des formules diplomatiques, les malentendus sont loin d’être dissipés.
Par Salma Semmar
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