Autrefois considérée comme un produit de base abordable pour les Marocains, l’huile d’olive devient un luxe. Habituellement commercialisée à un prix ne dépassant pas les 40 dirhams le litre, elle a désormais franchi la barre des 100 dirhams, une situation inédite qui suscite de vives inquiétudes chez les consommateurs.
Cette flambée des prix intervient dans un contexte paradoxal où les exportations marocaines d’huile d’olive vers l’Union européenne (UE) connaissent une forte hausse. Selon un rapport de la Commission européenne sur « la situation du marché des secteurs de l’huile d’olive et des olives de table », les exportations marocaines d’huile d’olive vers l’UE ont grimpé de 553 tonnes à 841 tonnes entre octobre et novembre 2024, soit une augmentation significative par rapport à la même période l’an dernier.
Pendant ce temps, au Maroc, la situation est toute autre. La production nationale d’huile d’olive est en baisse continue, atteignant cette saison seulement 90 000 tonnes, contre 106 000 tonnes la saison précédente et 145 000 tonnes en 2019/2020. Cette chute est attribuée aux effets dévastateurs de la sécheresse, qui ont compromis la récolte des olives et entraîné une réduction de l’offre sur le marché local.
Une hausse de la production mondiale, mais un Maroc en difficulté
Si le Maroc subit une crise de production, d’autres pays producteurs, notamment la Turquie et la Tunisie, affichent des performances en nette progression. La Tunisie a vu sa production bondir de 55 %, atteignant 340 000 tonnes contre 220 000 tonnes l’année précédente. Quant à la Turquie, elle enregistre une augmentation spectaculaire de 109 %, passant de 215 000 tonnes à 450 000 tonnes.
L’Europe, principal marché d’exportation du Maroc, connaît également une embellie. La production européenne d’huile d’olive a augmenté de 30 %, passant de 1 531 000 tonnes à 1 989 000 tonnes cette saison. L’Espagne, premier producteur mondial, affiche une progression notable de 51 %, avec une production atteignant 1 290 000 tonnes contre 854 000 tonnes en 2023/2024.
Une pression croissante sur le marché marocain
Malgré cette augmentation de la production mondiale, les Marocains subissent de plein fouet la hausse des prix. La baisse de l’offre nationale conjuguée à une demande extérieure accrue exerce une pression directe sur les prix locaux. De plus, la réduction des importations européennes d’huile d’olive, qui ont chuté de 31,4 % au début de la saison 2024/2025, contribue à cette tension.
Face à cette situation, les consommateurs marocains s’interrogent : l’huile d’olive, produit ancestral et indispensable dans la cuisine marocaine, restera-t-elle accessible aux familles ? Alors que le Maroc continue d’exporter une partie de sa production vers l’Europe, la priorité ne devrait-elle pas être donnée au marché local ?
Dans un pays où l’huile d’olive a toujours été un produit du quotidien, la flambée actuelle des prix risque d’accentuer les inégalités et d’exclure une grande partie de la population de sa consommation.
Limiter les exportations pour stabiliser les prix
Pour préserver un prix abordable de l’huile d’olive au Maroc, une régulation des exportations s’impose. Limiter les ventes à l’étranger garantirait un approvisionnement suffisant pour le marché local, stabilisant ainsi les prix. Une politique équilibrée entre export et consommation nationale est essentielle pour protéger le pouvoir d’achat des Marocains et assurer l’accessibilité de ce produit phare de l’alimentation marocaine.
.