Un vaste coup de filet vient d’être lancé dans le monde feutré des importateurs marocains. Selon Hespress, les services de contrôle de l’Office de change ont entamé une opération de vérification approfondie des documents d’importation de dizaines d’entreprises marocaines, soupçonnées d’avoir falsifié des factures et dissimulé de véritables montants d’importation pour détourner près de 780 millions de dirhams.
Cette campagne ciblée, initiée à la lumière de rapports transmis par la division d’audit et de gestion des risques relevant de la direction générale de l’office, met en cause des sociétés opérant principalement avec des pays asiatiques, en tête desquels figurent la Chine, la Thaïlande et le Vietnam.
Des montages financiers sophistiqués
Les pratiques incriminées reposeraient sur un système bien rôdé. Les importateurs auraient présenté aux douanes marocaines des documents bancaires attestant de transferts financiers sous-évalués vers les fournisseurs étrangers. En parallèle, ils auraient versé le reste des sommes via des intermédiaires établis en Asie, en monnaie locale, échappant ainsi aux canaux officiels. Résultat : réduction des droits de douane et évasion partielle du contrôle des changes.
Des agents marocains établis à l’étranger, notamment en Chine, sont cités comme acteurs clés de ce système. Ces derniers auraient mis en place un réseau de change informel, échangeant des dirhams contre des yuans, puis rapatriant l’argent vers la Chine en le faisant passer pour les profits d’entreprises chinoises opérant au Maroc.
Les douanes, les impôts et les banques en alerte
L’Office de change collabore désormais avec ses homologues étrangers pour tracer les flux financiers suspects. Les banques marocaines ayant autorisé les transferts sont, elles aussi, passées au crible : il s’agit de vérifier si les autorisations de transfert étaient valides, alors qu’une affaire récente impliquant de faux agréments a révélé la porosité du système.
Les autorités examinent aussi la situation juridique et fiscale des entreprises concernées. Les premiers résultats montrent des sociétés nouvellement créées, aux statuts flous, avec peu ou pas d’historique commercial, mais ayant effectué un nombre anormalement élevé d’opérations d’importation de biens de petite taille (jouets, gadgets, fournitures), souvent liés à des périodes spécifiques comme Ramadan, Aïd ou la rentrée scolaire.
Ce vaste chantier d’assainissement vise à restaurer la transparence du commerce extérieur et à mettre fin à une hémorragie financière alimentée par une fraude de plus en plus structurée.
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