L’annonce récente du général de réserve Eyal Zamir, nouvellement nommé chef d’état-major de l’armée israélienne et directeur général du ministère de la Défense, a suscité une onde de choc en Israël. Selon des chiffres révélés par la chaîne 12 israélienne, 5 942 nouvelles familles ont rejoint la liste des « familles endeuillées » en 2024, et plus de 15.000 blessés ont été pris en charge par le système de réhabilitation militaire.
Ces chiffres, bien plus élevés que les données précédemment annoncées, relancent les interrogations sur la transparence de l’armée israélienne concernant ses pertes depuis le début de l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » et les combats qui ont suivi à Gaza, au Liban et en Cisjordanie.
Une annonce stratégique ou un aveu contraint ?
Jusqu’à présent, les bilans officiels faisaient état d’environ 1 800 morts, dont 400 soldats tombés lors de l’offensive terrestre à Gaza. L’annonce de Zamir, qui multiplie par plus de trois ces chiffres, interpelle les analystes. Selon le spécialiste des affaires israéliennes Azzam Abu Al-Adas, cette révélation pourrait être une tentative d’anticiper des fuites, l’armée israélienne ayant déjà été confrontée à des divulgations incontrôlées dans le passé.
Le chercheur Imad Abu Awwad estime, quant à lui, que cette déclaration s’inscrit dans une stratégie habituelle : divulguer progressivement les pertes après la fin des hostilités. L’objectif serait de préparer l’opinion publique israélienne à des chiffres qui finiront de toute façon par être connus, notamment à travers les commissions d’enquête qui suivent chaque conflit majeur.
Un bilan encore plus lourd en coulisses ?
Malgré la censure imposée par les autorités israéliennes, certaines fuites évoquent un bilan encore plus dramatique. Des sources médicales suggèrent que le nombre total de morts israéliens lors de cette guerre, tous fronts confondus, s’élèverait à 13 000. Un chiffre corroboré par des analyses du journaliste militaire Yossi Yehoshua, qui estime que des centaines de commandants et soldats ont péri et que près de 12 000 militaires ont été blessés ou gravement handicapés.
Le recul stratégique de certaines unités, comme le retrait de la brigade Givati de Gaza après avoir perdu 86 soldats et officiers, témoigne de la rudesse des combats et de l’ampleur des pertes. Ces nouvelles révélations contredisent les précédents bilans qui n’évoquaient que 900 morts dans les rangs de l’armée.
Des répercussions sur l’avenir de l’armée israélienne
Derrière cette annonce, une véritable stratégie militaire se dessine. Zamir plaide pour une refonte du modèle de l’armée israélienne, en mettant l’accent sur l’augmentation des effectifs terrestres et une dépendance moindre aux technologies avancées. Dans cette optique, l’armée accélère la reconstruction de ses forces blindées, avec la production massive de chars Merkava 4 et la remise en état de centaines de véhicules militaires endommagés.
Un autre enjeu majeur concerne le service militaire obligatoire des ultra-orthodoxes (« haredim »). Le spécialiste Firas Yaghi estime que Zamir tente de créer un consensus politique et militaire autour d’une loi rendant obligatoire l’enrôlement de cette population, une question qui divise profondément la société israélienne. Toutefois, la position fragile de Benjamin Netanyahu, qui dépend du soutien des partis religieux pour maintenir son gouvernement, rend cette réforme hautement incertaine.
Un aveu aux lourdes conséquences
L’annonce de Zamir pourrait raviver la contestation en Israël, où la gestion de la guerre et le coût humain sont de plus en plus remis en cause. L’ampleur des pertes révélées pourrait avoir des répercussions sur la confiance du public envers l’armée et l’avenir politique du gouvernement Netanyahu, qui a toujours tenté de minimiser les impacts de cette guerre.
Loin d’être anodine, cette prise de parole risque d’ouvrir une nouvelle séquence de débats internes en Israël, entre nécessité de transparence et impératif de préserver l’image d’une armée invincible.
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