À quelques jours d’une échéance décisive, un nuage réglementaire menace de perturber un pilier stratégique de l’économie marocaine : les transferts des Marocains résidant à l’étranger. En toile de fond, une directive européenne aux effets potentiellement dévastateurs, susceptible de fragiliser jusqu’à 130 milliards de dirhams de flux financiers. Conscient de l’urgence, le Maroc active ses leviers diplomatiques et financiers pour éviter une rupture aux conséquences lourdes.
À la manœuvre, Abdellatif Jouahri avance avec méthode et sang-froid. Lors de la réunion trimestrielle du Conseil de Bank Al-Maghrib, tenue ce mardi 16 décembre 2025, le Wali a fait état d’avancées notables dans les discussions engagées avec la France. « Les signaux sont positifs du côté français », a-t-il déclaré, laissant entrevoir un compromis susceptible de préserver l’activité des filiales bancaires marocaines sur le territoire hexagonal. Un pas décisif, quand on sait que la France concentre à elle seule près d’un tiers des transferts opérés par les MRE.
Mais l’équation dépasse largement le cadre bilatéral. L’accord esquissé avec Paris n’aura de portée réelle qu’une fois validé par la Commission européenne. Rabat mise sur cette approbation pour en faire un précédent juridique à l’échelle de l’Union, capable de débloquer les négociations avec d’autres pays clés de la diaspora marocaine, tels que l’Espagne, l’Italie, la Belgique ou encore les Pays-Bas.
Le calendrier, lui, ne laisse que peu de marge. Publiée en juin 2024, la directive européenne entrera en application dès le 1er janvier 2026. Pensée à l’origine pour encadrer les retombées du Brexit, elle pourrait, par ricochet, restreindre l’accès des banques non européennes à des services essentiels : ouverture de comptes, produits d’épargne ou opérations de transfert. Une perspective qui ferait planer le risque renforcé d’un assèchement brutal du lien financier entre la diaspora et le Royaume.
Face à cette épée de Damoclès, la prudence reste de mise. Si le climat politique semble favorable, Abdellatif Jouahri insiste sur la complexité technique et juridique du dossier. Chaque clause doit être solidement verrouillée afin d’éviter, à l’avenir, toute lecture restrictive de la part des régulateurs européens. Une vigilance indispensable pour protéger une manne appelée à franchir le seuil des 130 milliards de dirhams à l’horizon 2027 et préserver l’un des piliers de la stabilité macroéconomique du Maroc.










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