Quelle image impensable ! Les larmes aux yeux, un ancien président français annonçant qu’il acceptera le jugement définitif de la justice de son pays et qu’il dormira en prison pendant cinq ans, tout en estimant avoir été injustement condamné sous l’influence d’ennemis qu’il ne nomme pas. Hier, tous les médias ont bouleversé leurs unes à la dernière minute, annonçant ce verdict inédit dans l’histoire de la Ve République, un véritable séisme pour la vie politique.
Plusieurs années après l’ouverture d’une enquête sur un financement illégal, par un pays étranger — la Libye —, de sa campagne électorale, une affaire d’État révélée par le magazine d’investigation Mediapart, Nicolas Sarkozy savait que la justice, indépendante du pouvoir, irait très loin. Elle prendrait le temps d’accumuler les preuves recherchées et de les mettre au jour avec une rare détermination, sans être aux ordres de quiconque ni soumise à un agenda.
Il ne reste plus à Sarkozy qu’à attendre le 13 octobre pour être fixé sur sa date d’incarcération. Car, bien qu’il ait décidé de faire appel, la sentence devient effective et immédiate selon la loi française. Cette issue inédite fera encore couler beaucoup d’encre, et le débat politique, enflammé, qui oppose une droite majoritaire à des partis de gauche sur les plateaux de télévision, est loin de s’éteindre.
Accablé par le verdict et la perspective d’une incarcération synonyme d’humiliation, l’ancien chef de l’État est apparu résigné et inconsolable à l’annonce de sa condamnation, trouvant toutefois les mots justes pour décrire l’effondrement qu’il traverse. On devine la détresse d’un homme qui a exercé les plus hautes fonctions, affronté crises et joies, rencontré les plus grands dirigeants du monde, et connu une ascension remarquable pour ce fils d’immigré.
Par Jalil Nouri