La Russie semble vouloir jouer un rôle inédit dans le dossier du Sahara, un conflit qui oppose depuis des décennies le Maroc, l’Algérie, la Mauritanie et le Polisario. Ce repositionnement de Moscou intervient dans un contexte de blocage des négociations, les dernières tables rondes sous l’égide de l’ONU datant de 2019. Ce rôle de médiateur potentiel pourrait marquer un tournant stratégique pour la diplomatie russe.
Une diplomatie en quête d’équilibre
Traditionnellement proche des thèses algériennes et du Polisario, la Russie a récemment manifesté une volonté de nuancer sa position. Les tensions récentes entre Alger et Moscou semblent avoir favorisé un éloignement subtil de cette ligne historique. Désormais, Moscou affiche des ambitions plus équilibrées, en mettant en avant ses relations amicales avec le Maroc.
Lors d’une conférence de presse récente, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a souligné ces liens, affirmant que la Russie « aide » le Maroc à résoudre les défis liés au Sahara. Lavrov a réaffirmé la position de principe de son pays en faveur de l’« autodétermination » des Sahraouis, tout en précisant que toute résolution devrait être basée sur un consensus entre les parties.
Une opportunité géopolitique pour Moscou
Dans un monde multipolaire, la Russie pourrait tirer profit d’un rôle de médiateur dans ce conflit. Alors que l’initiative marocaine d’autonomie, proposée en 2007, gagne un soutien international croissant, y compris celui des États-Unis et de l’Espagne, Moscou cherche à renforcer sa crédibilité sur la scène diplomatique. En s’impliquant dans le déblocage du dossier, elle pourrait signer une victoire géopolitique importante.
Le statut de la Russie en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies confère à son intervention un poids considérable. De plus, elle dispose d’un atout que peu d’autres acteurs peuvent revendiquer : une relation privilégiée à la fois avec le Maroc et l’Algérie, le principal frein à une résolution du conflit.
Une stratégie d’équilibriste
Bien que la Russie ait critiqué, en 2020, la reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara sous l’administration Trump, elle s’est depuis montrée plus neutre, notamment en s’abstenant de voter sur certaines résolutions du Conseil de sécurité. Ce changement reflète une adaptation à un contexte géopolitique en mutation.
Les déclarations récentes de l’ambassadeur russe à Rabat, qualifiant le Maroc de « partenaire stratégique » et de « pays ami », confirment cette volonté de rapprochement. Cette dynamique vise à préserver l’équilibre entre deux partenaires historiques, tout en jouant un rôle constructif dans la résolution du conflit.
Vers une diplomatie gagnante ?
En adoptant une posture de médiateur, la Russie pourrait non seulement consolider sa relation avec le Maroc, mais également renforcer son image sur la scène internationale comme acteur incontournable des conflits globaux. Toutefois, la question demeure : Moscou pourra-t-elle réellement surmonter les défis inhérents à ce rôle, notamment en naviguant entre ses intérêts historiques en Algérie et ses ambitions nouvelles avec le Maroc ?
Seul l’avenir dira si cette stratégie portera ses fruits, mais une chose est sûre : la Russie est désormais un acteur à surveiller de près dans le dossier du Sahara.
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