La Tunisie cherche à apaiser les tensions avec le Maroc et à normaliser ses relations diplomatiques après trois ans de froid, conséquence notamment de l’accueil controversé de Brahim Ghali, chef du Polisario, par le président tunisien Kaïs Saïed lors du sommet Afrique-Japon (TICAD) en 2022. Cet événement avait suscité l’indignation du Maroc, qui avait rappelé son ambassadeur à Tunis et dénoncé « un acte grave et sans précédent ».
Selon une source proche du ministère tunisien des Affaires étrangères, la Tunisie est animée par une « volonté forte et déterminée » d’ouvrir une nouvelle page avec Rabat. Des initiatives auraient été prises récemment pour réchauffer les relations bilatérales, bien qu’elles se heurtent à certaines difficultés. Le ministère affirme vouloir établir des relations « équilibrées et équitables » avec toutes les capitales maghrébines, mettant fin à l’immobilisme diplomatique avec le Maroc.
Une responsabilité présidentielle pointée du doigt
Sur le plan interne, plusieurs observateurs tunisiens, notamment des hommes politiques et des défenseurs des droits humains, imputent la détérioration des relations maroco-tunisiennes à Kaïs Saïed. Ils critiquent ouvertement le président pour son alignement perçu sur les positions de l’Algérie et du Polisario, estimant que cette posture a nui aux intérêts de la Tunisie et à ses liens historiques avec le Maroc. Ces voix appellent désormais à multiplier les gestes de rapprochement pour renouer avec Rabat.
Les enjeux du différend
Le Maroc, pour sa part, accorde une importance capitale à la question de son intégrité territoriale. Dans son discours à l’occasion de la Révolution du Roi et du Peuple, le roi Mohammed VI avait appelé les partenaires du Royaume à clarifier leur position sur la marocanité du Sahara, soulignant qu’aucune ambiguïté ne serait tolérée. Ce message, bien qu’adressé à plusieurs acteurs internationaux, résonne particulièrement dans le contexte maghrébin, où les positions tunisiennes restent ambiguës.
Pour rappel, le Maroc avait qualifié l’accueil de Brahim Ghali en Tunisie d’atteinte aux sentiments du peuple marocain et à ses intérêts suprêmes. De son côté, la Tunisie avait justifié cette invitation comme relevant de son engagement envers l’Union africaine, tout en affirmant sa volonté de préserver ses relations avec le Maroc.
Vers une sortie de crise ?
Bien que les tensions persistent, la Tunisie semble déterminée à aller de l’avant. Toutefois, son implication récente dans des initiatives tripartites maghrébines pilotées par l’Algérie, ainsi que son adhésion au principe du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », rendent complexe un rapprochement avec le Maroc.
Retrouver une relation harmonieuse nécessitera un investissement diplomatique important, accompagné de clarifications sur des questions sensibles et d’un dialogue ouvert entre les deux pays. Une telle entente pourrait marquer un tournant décisif pour relancer la coopération maghrébine, aujourd’hui freinée par de profondes divergences politiques.
Pour rétablir des relations solides avec le Maroc, la Tunisie devra prouver que sa priorité réside dans la construction d’un avenir commun, loin de toute stratégie politique ou calcul opportuniste. Un engagement transparent et équilibré sera indispensable pour parvenir à des avancées concrètes. De son côté, le Maroc attend une reconnaissance explicite et sans ambiguïté de sa souveraineté sur le Sahara, condition qu’il juge primordiale pour établir une relation basée sur la confiance et le respect mutuel.
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