Sous le haut patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Marrakech accueille en 2025 une nouvelle étape du programme OIC Youth Capital. Après Dhaka, Kazan ou Doha, la Ville ocre devient le carrefour où se rencontrent jeunesse, culture et innovation sociale.
Le thème choisi – « Volontariat : réalité et perspectives » – reflète un enjeu majeur : dans des sociétés traversées par des transitions rapides, le bénévolat n’est plus seulement “donner un peu de son temps”, mais un vecteur de solidarité, d’employabilité et de formation citoyenne.
Dès l’ouverture, l’atmosphère est vibrante : drapeaux de 57 pays, visages venus de tout le monde islamique, ateliers mêlant traditions et innovations. Marrakech se transforme en laboratoire vivant, où les expériences locales dialoguent avec les grandes dynamiques globales : l’organisation du Hajj et ses milliers de volontaires, les campagnes de santé communautaire au Liban, les programmes d’employabilité au Maroc, ou encore la coordination lors de catastrophes climatiques.
Dans ce décor, la réflexion prend toute sa force : le bénévolat n’est pas un supplément, mais une colonne vertébrale invisible qui soutient les sociétés musulmanes, entre foi, service et innovation.
Quand l’action parle plus fort que les discours
Le volontariat se mesure à l’épreuve du terrain. Au Hajj, des milliers de jeunes bénévoles formés deviennent les gardiens silencieux d’un des plus grands rassemblements humains au monde. Dans les services d’urgence, chaque heure donnée représente une vie mieux protégée. Et dans certains visages, tout se résume : Asif Bashir, surnommé « l’ange de Mina », qui sauva sous le soleil brûlant de 2024 plusieurs pèlerins en distribuant de l’eau, en les portant parfois sur ses épaules ; ou encore les milliers de jeunes Marocains qui, grâce au programme A Chance to RESET, ont transformé leur engagement en emploi stable et en nouvelle confiance en l’avenir.
Ces histoires, différentes mais complémentaires, révèlent une même vérité : le bénévolat est un système nerveux invisible qui irrigue nos sociétés, tantôt dans l’urgence, tantôt dans la construction patiente de l’avenir.
Ce que révèlent ces engagements
Professionnalisation
Partout, l’engagement se structure : formations, certifications, partenariats. Les volontaires du Croissant-Rouge saoudien ne sont plus de simples “bras”, mais des acteurs logistiques et médicaux formés. Le bénévolat devient un sas d’expérience, un levier d’apprentissage et d’insertion.
Foi et service public
Historiquement enraciné dans la zakat et la sadaqa, le don se traduit aujourd’hui par des fonds gérés par des ONG et des dispositifs institutionnels. La solidarité devient traçable, reliant geste spirituel et efficacité sociale.
Une école parallèle
Qu’il s’agisse d’Asif Bashir ou des jeunes d’EFE-Maroc, l’engagement transforme autant celui qui aide que celui qui reçoit :
- Personnel : confiance en soi, sentiment d’utilité, appartenance.
- Professionnel : gestion de projet, communication, leadership.
- Symbolique : reconnaissance et crédibilité.
Le volontariat devient une pédagogie invisible, une université de la vie qui transmet ce qu’aucun cursus ne formalise.
Réponse aux fragilités
Face au chômage des jeunes (près de 37 % au Maroc) et aux crises sanitaires ou climatiques, le volontariat agit comme amortisseur social. Mais il va plus loin : il installe une culture de résilience collective, indispensable au développement durable.
Que faire maintenant ?
Le Maroc et le monde islamique doivent reconnaître le bénévolat comme un capital citoyen et professionnel : l’intégrer dans les cursus, le relier à l’emploi, et le professionnaliser par la formation et le mentorat. Former, reconnaître et relier : trois axes pour faire du volontariat une véritable infrastructure sociale, où chaque jeune apprend à donner — et à grandir.
Le bénévolat est à la fois héritage spirituel – prolongement de la zakat et de la sadaqa – et innovation sociale face aux crises contemporaines. De Mina à Marrakech 2025, il s’impose comme un pilier discret mais décisif : servir les autres tout en se construisant soi-même.
Par Dr Wadih Rhondali – Psychiatre