Lancé à grands renforts de communication comme la solution idéale pour les femmes musulmanes désireuses de profiter des plaisirs de la baignade tout en respectant leur pudeur religieuse, le burkini n’a visiblement pas trouvé sa place dans le paysage balnéaire marocain. Malgré son ambition d’allier foi et loisirs, ce maillot couvrant de la tête aux pieds peine à séduire.
Un succès annoncé… qui n’a jamais vraiment eu lieu
Présenté comme un article incontournable pour les femmes voilées ou conservatrices, le burkini a fait une apparition timide sur les plages marocaines, sans jamais réellement y prospérer. Commercialisé principalement dans les magasins spécialisés dans la « mode islamique », ou via des sites de e-commerce, son impact reste confidentiel. Il n’est pas rare de constater que certains stocks ne trouvent pas preneurs, les rares pièces exposées restant plusieurs saisons invendues.
La piscine, un espace clos… et fermé au burkini
L’une des principales raisons de cet échec relatif est l’interdiction quasi systématique du burkini dans la majorité des piscines privées du royaume. Ce refus, souvent justifié par des normes d’hygiène ou des règlements internes, a été pointé du doigt par des associations de défense des libertés religieuses. Mais rien n’y fait : le burkini reste persona non grata dans les bassins. Ajoutez à cela la réticence de nombreuses femmes voilées à fréquenter des plages mixtes – considérées comme inappropriées – et l’on comprend mieux pourquoi ce produit peine à s’imposer.
Un vêtement en décalage avec l’air du temps ?
Au Maroc, la société demeure tiraillée entre conservatisme et modernité. Si une partie de la population féminine fait le choix du hijab ou d’une tenue plus discrète, une autre assume pleinement sa féminité dans les codes de la mode contemporaine. Sur les plages, bikinis, jupes légères et robes estivales se côtoient sans complexe. Le burkini, dans cette ambiance libérée, peut apparaître comme une dissonance visuelle, voire idéologique.
Une greffe culturelle qui ne prend pas
Importé d’Australie par la créatrice libanaise Aheda Zanetti dans les années 2000, le burkini a suscité de vifs débats en Europe, notamment en France où plusieurs municipalités avaient tenté de l’interdire. Mais au Maroc, le débat ne fait pas rage : c’est plutôt par le manque d’intérêt qu’il s’efface. Cela ne signifie pas pour autant que la mode islamique n’a pas d’avenir dans le pays – bien au contraire. L’offre en abayas, tuniques amples ou foulards stylisés prospère, preuve que la religion et l’élégance peuvent cohabiter dans d’autres domaines.
Une société féminine plurielle
La diversité des styles vestimentaires féminins dans le royaume est le reflet d’une société en transition, où cohabitent plusieurs visions de la femme. Le burkini, trop rigide ou trop associé à une vision particulière de l’islam, n’a peut-être pas su séduire au-delà d’un cercle restreint. Et la gent féminine marocaine, souvent en avance sur les tendances régionales, semble préférer des compromis plus subtils entre pudeur et modernité.
Qu’on le veuille ou non, le duel burkini-string n’aura pas lieu, du moins pas sur les plages marocaines. Le burkini, lancé avec l’ambition d’un produit de niche à fort potentiel, n’a pas réussi à franchir le seuil de la marginalité. Entre contraintes pratiques, choix sociétaux et refus d’une certaine uniformisation religieuse, son avenir reste incertain dans un Maroc qui conjugue identité musulmane et ouverture sur le monde.