Par sa nouvelle stratégie énergétique, le Maroc s’engage dans une transformation majeure, plaçant le gaz naturel au cœur de son mix énergétique. À l’horizon 2030, le Royaume ambitionne de faire passer la part du gaz naturel à 30 % de sa production énergétique nationale. Un virage assumé, porté par des projets structurants qui devraient remodeler en profondeur le paysage énergétique national et renforcer la souveraineté énergétique du pays.
Au centre de cette dynamique, la création du premier terminal de gaz naturel liquéfié (GNL) à Nador West Med, sur la façade méditerranéenne, marque un jalon décisif. Cette infrastructure accueillera une unité flottante de stockage et de regazéification (FSRU), permettant d’assurer une partie significative de l’approvisionnement national. À cela s’ajoutent deux autres projets de plateformes similaires : l’une prévue sur l’Atlantique à Mohammedia ou Jorf Lasfar, l’autre plus au sud à Dakhla. Ces installations, stratégiquement situées, doivent devenir les nouveaux poumons énergétiques du Maroc, capables d’alimenter efficacement les zones industrielles les plus gourmandes en énergie, comme Kénitra et Mohammedia, ainsi que les centrales électriques de l’ONEE.
Mais au-delà des terminaux, c’est tout un réseau de pipelines qui est en cours de planification. Quatre nouveaux gazoducs sont prévus pour acheminer le gaz importé et domestique : deux pour relier les gisements de Tendrara et d’Anchois, un troisième pour connecter au Gazoduc Maghreb-Europe (GME), et un quatrième destiné à desservir les bassins industriels et à prolonger l’approvisionnement jusqu’au futur port de Dakhla.
Une solution de transition en attendant l’hydrogène vert
Dans l’attente de la maturité technologique et économique de l’hydrogène vert — fer de lance de la transition énergétique à long terme — le gaz naturel apparaît comme l’option la plus réaliste et la plus propre. Moins polluant que le charbon, plus flexible que le solaire ou l’éolien en matière de production continue, le gaz constitue un relais efficace pour accompagner le verdissement progressif du mix énergétique.
Rentabilité, efficacité et souveraineté : les défis à venir
Plusieurs questions clés se posent néanmoins : d’où viendra ce gaz naturel liquéfié ? Le Maroc devra diversifier ses fournisseurs dans un marché mondial très concurrentiel, avec des géants comme le Qatar, les États-Unis ou encore le Nigeria en tête de liste. La rentabilité du modèle dépendra donc du coût d’importation, des capacités de stockage, de la logistique portuaire et de la gestion des prix sur le marché international.
Sur le plan de l’efficacité, le pari repose sur la rapidité de mise en service des infrastructures, la sécurisation de contrats d’approvisionnement à long terme et la bonne articulation entre les terminaux et les réseaux de distribution internes. C’est également un enjeu de souveraineté énergétique, dans un contexte géopolitique mouvant où le gaz est devenu un levier de puissance.
En plaçant le GNL au cœur de sa stratégie énergétique, le Maroc anticipe les mutations globales et se dote d’un outil puissant de transition. Reste à transformer l’essai en construisant une filière intégrée, compétitive et durable, capable de soutenir son développement industriel tout en préparant l’avènement d’un futur énergétique encore plus vert.