Chaque automne, des milliers de retraités français prennent la route du sud pour poser leurs valises… au Maroc. Loin d’un simple effet de mode, le mouvement s’installe dans la durée : couples du « troisième âge » et familles qui viennent leur rendre visite au moins une fois par an ont trouvé, au fil des saisons, une « seconde patrie » au royaume.
Au cœur de cette migration douce, la région du Souss s’impose comme épicentre. Autour d’Agadir, les camping-cars se fondent dans le paysage, attirés par un climat réputé clément — soleil présent près de 300 jours par an —, un coût de la vie mesuré, une plage généreuse et un art de vivre hospitalier. Dans les souks comme chez les petits commerçants, on reconnaît désormais ces visiteurs au long cours par leur prénom… et parfois par le nom de leur compagnon à quatre pattes. Beaucoup ont « élu domicile » pour la moitié de l’année dans la capitale du Sud et les villes voisines.
Sereins, discrets et souvent engagés dans la vie de quartier, ces couples ne se perçoivent plus comme des touristes. Après avoir fermé leur résidence principale en France pour l’automne-hiver, ils s’ancrent dans leur environnement marocain : même café, mêmes marchés, mêmes routines. Le va-et-vient familial s’inverse alors : ce sont les enfants et petits-enfants qui viennent passer quelques jours « au soleil », renouant avec une convivialité sans fard.
Ce modèle de vie partagée entre deux rives reste rare en Europe, en dehors de l’Espagne. Au Maroc, il s’installe sans heurts : la proximité culturelle, la francophonie de nombreux interlocuteurs, la qualité d’accueil et l’accessibilité des services favorisent une intégration paisible, sans sentiment de décalage civilisationnel ni nostalgie pesante. Pour beaucoup, la question n’est plus de « partir loin », mais de « vivre mieux » une seconde saison de leur existence.
Le phénomène inspire déjà reportages et carnets de route. Il mériterait, à plus d’un titre, une fiction ancrée dans le réel : chronique d’un vivre-ensemble simple et chaleureux, où la rencontre quotidienne — au marché, au café, sur la corniche — raconte mieux qu’un discours la force d’attraction d’un pays qui sait accueillir.
Par Mounir Ghazali