Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a dressé lundi un constat sans appel devant la Chambre des représentants : l’actuel Code de commerce, inchangé dans ses fondements depuis sa promulgation en 1996, est devenu un véritable obstacle au développement du tissu entrepreneurial national. À ses yeux, ce cadre juridique, trop rigide et inadapté, pénalise aussi bien les grandes entreprises que les TPE, sans distinction de taille, de structure ni de capacité financière.
Un droit des affaires figé, des entreprises asphyxiées
Le ministre a insisté sur l’urgence d’une réforme ambitieuse du Code, notamment dans son volet relatif aux entreprises en difficulté. Il s’est insurgé contre l’uniformité des procédures de redressement et de liquidation judiciaire appliquées indistinctement, qu’il s’agisse d’un géant industriel ou d’un petit commerce de quartier. « Il est illogique », affirme Ouahbi, « qu’une entreprise de 100 milliards de dirhams soit soumise aux mêmes règles qu’une autre dont le capital ne dépasse pas 100 dirhams ». Ce traitement indifférencié ne fait qu’encombrer les tribunaux de commerce, déjà submergés par les contentieux liés aux impayés et à l’évasion fiscale.
Un projet de décret pour encadrer les syndics judiciaires
Dans cette dynamique de révision partielle, le ministère a finalisé un projet de décret visant à encadrer le statut du syndic judiciaire, acteur clé dans les procédures collectives. Le texte, qui sera soumis au prochain Conseil de gouvernement, définira les missions, les compétences et les responsabilités du syndic afin d’éviter les abus et les confusions, fréquents dans les dossiers de redressement.
Moderniser le droit commercial pour accompagner la croissance
La réforme du Code de commerce ne constitue pas seulement une question juridique : elle est désormais perçue comme une condition sine qua non pour accompagner la transition économique du Royaume, attirer les investisseurs et renforcer la compétitivité du secteur privé. Dans un Maroc en mutation, où la croissance repose de plus en plus sur la PME et l’innovation, le droit commercial se doit de refléter les réalités économiques, en intégrant la différenciation, la souplesse et la rapidité.
Soutien affirmé aux élus de bonne foi
Dans une autre intervention remarquée, Abdellatif Ouahbi s’est démarqué en plaidant pour une distinction claire entre les actes de corruption et les erreurs de gestion commises de bonne foi par les présidents de communes. Pour lui, poursuivre un élu intègre qui a fait une mauvaise évaluation administrative revient à décourager l’engagement politique local. « Il faut cesser d’assimiler tous les élus à des corrompus », a-t-il martelé, appelant à restaurer un climat de confiance et à éviter la paralysie des collectivités.
Vers une justice plus pragmatique
Ce double plaidoyer, en faveur d’une réforme structurelle du Code de commerce et d’une approche équilibrée dans la gestion des fautes administratives, illustre la volonté du ministre de faire évoluer la justice vers plus de rationalité, d’efficacité et de protection des acteurs économiques et institutionnels. La balle est désormais dans le camp du gouvernement pour transformer ces annonces en réformes concrètes.
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