Dans un contexte de vulnérabilité énergétique persistante en Europe, le Portugal rebat les cartes de ses alliances en matière d’approvisionnement électrique. La ministre portugaise de l’Environnement et de l’Énergie, Maria da Graça Carvalho, a récemment déclaré que son pays envisage sérieusement la création d’une interconnexion directe avec le Maroc, une option rendue d’autant plus urgente par les blocages qui entravent le projet de liaison avec la France.
Une alternative méditerranéenne crédible
Le Portugal, tout comme son voisin espagnol, est confronté à l’isolement énergétique de la péninsule ibérique, toujours qualifiée d’« île énergétique » en raison de ses connexions limitées avec le reste de l’Europe. La panne d’avril dernier a mis en lumière cette fragilité structurelle. Ce jour-là, c’est grâce à l’interconnexion existante entre le Maroc et l’Espagne que le courant a pu être rétabli en partie, soulignant le rôle stratégique de l’infrastructure marocaine.
Si l’interconnexion avec la France reste logiquement prioritaire, les lenteurs du projet poussent Lisbonne à envisager une voie plus méridionale mais réaliste. « La connexion avec le Maroc serait plus coûteuse, mais elle est à l’étude », a affirmé Maria da Graça Carvalho, à la suite d’une réunion à Bruxelles avec le commissaire européen à l’Énergie, Dan Jørgensen.
Une démarche à double lecture : pragmatique et politique
Dans une lettre conjointe adressée à la Commission européenne et signée également par la ministre espagnole de la Transition écologique, Sara Aagesen, les gouvernements portugais et espagnol réclament la tenue d’un sommet tripartite avec Paris afin de fixer une feuille de route concrète. Selon les deux capitales ibériques, l’achèvement de ces connexions ne peut plus être relégué au second plan, car il en va de la résilience énergétique de toute l’Europe.
« Ce n’est plus une option mais une responsabilité commune », martèle la missive, insistant sur les conséquences économiques et environnementales d’un tel retard. Les deux pays alertent notamment sur le frein à l’exploitation des énergies renouvelables, la flambée des prix de l’électricité, et la fragilité accrue des systèmes d’approvisionnement.
Le Maroc, acteur énergétique incontournable
Le choix d’un partenariat énergétique renforcé avec le Maroc n’est pas anodin. En plus d’avoir prouvé son efficacité dans des situations critiques, le royaume chérifien investit massivement dans les énergies vertes, en particulier le solaire et l’éolien, avec l’ambition de devenir un hub énergétique régional entre l’Europe et l’Afrique.
Pour Lisbonne, cette orientation vers le sud n’est pas uniquement une réponse conjoncturelle, mais une stratégie de diversification des sources et des partenaires, dans un monde où la géopolitique de l’énergie redessine les alliances à grande vitesse.