Lors du conseil des ministres tenu hier samedi au palais royal de Casablanca, le Roi Mohammed VI a pris la décision de limoger plusieurs hauts responsables à la tête d’institutions stratégiques et vitales du Royaume, notamment dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des autoroutes et des aéroports.
Les Limogeages
Parmi les figures les plus notables visées par cette décision, on trouve Abderrahim El Hafidi, directeur général de l’Office National de l’Électricité et de l’Eau Potable (ONEE) depuis 2018. Sous sa direction, la dette de l’office a atteint 100 milliards de dirhams à la fin de l’année 2022, selon des rapports d’institutions constitutionnelles.
Anouar Benazzouz, nommé en 2014 à la tête de la Société Nationale des Autoroutes du Maroc (ADM), a également été relevé de ses fonctions. Habiba Laklalech, présidente de l’Office National des Aéroports (ONDA), et Mustapha Bakkoury, président-directeur général de l’Agence Marocaine pour l’Énergie Durable (MASEN), font également partie des responsables limogés.
Objectifs et Justifications
Ces limogeages et les nouvelles nominations à la tête de ces institutions sont perçus, par les experts, comme une étape dans la lutte contre la corruption, l’amélioration des services et des performances des institutions publiques, la protection des fonds publics, et l’accélération des réformes et des projets en préparation de l’organisation de la Coupe du Monde 2030. Certains analystes lient également ces changements à un éventuel remaniement gouvernemental à venir.
Dysfonctionnements
Abdelmajid Bouzidi, chercheur en droit public et sciences politiques, a souligné que les nouvelles nominations concernent des institutions cruciales pour le développement économique et l’intégration régionale et internationale du Maroc, telles que les aéroports, les ports, les autoroutes, l’eau et l’énergie. Ces infrastructures sont essentielles, particulièrement en vue de l’organisation des finales de la Coupe du Monde 2030, nécessitant des infrastructures adéquates.
Le chercheur a également mentionné les dysfonctionnements relevés dans ces institutions par divers rapports nationaux. Par exemple, le Conseil Supérieur des Comptes a signalé des irrégularités à l’Agence Nationale des Ports, des marchés douteux à l’ONDA, ainsi que l’intervention du ministre de tutelle pour interdire une entreprise de contrats pendant trois ans.
Les problèmes de gouvernance et de gestion, ainsi que l’accumulation des dettes dépassant les 100 milliards de dirhams, ont été pointés par le Conseil de la Concurrence pour l’ONEE. De même, une commission exploratoire de la Chambre des Représentants a relevé des défaillances de gouvernance et de services chez ADM.
Accélération du Travail Gouvernemental
Mohamed Chekir, chercheur en sciences politiques, a fait le lien entre les résultats du conseil des ministres et les possibles changements d’un remaniement gouvernemental à venir. Il a souligné que ce conseil des ministres, conformément aux dispositions de la constitution, comprenait la nomination de responsables et de directeurs des institutions publiques comme l’ONEE, l’ONDA et MASEN. Ces décisions royales devraient stimuler et accélérer le travail gouvernemental, coïncidant avec un potentiel remaniement.
Chekir a également insisté sur le fait que la nomination royale de certains responsables dans des institutions stratégiques vise à améliorer les performances et l’efficacité de ces institutions. Certains des responsables remplacés ont été affectés par une « colère royale », comme Mustapha Bakkoury, dont le poste est resté vacant en raison de ses accusations de détournement de fonds publics. L’institution qu’il dirigeait joue un rôle crucial dans la mise en œuvre des projets du Royaume en matière d’énergie renouvelable, ayant réalisé la plus grande centrale solaire d’Afrique à Ouarzazate et la plus grande station éolienne à Tarfaya. Les rapports sur les difficultés financières de l’ONEE et le déficit financier de l’office ont conduit à cette nomination, tandis que d’autres responsables ont été renouvelés après avoir atteint l’âge de la retraite.