Le ministère espagnol de l’Industrie, du Commerce et du Tourisme a incité les entreprises touchées par la suspension des relations commerciales décidée par l’Algérie en réponse au changement de position sur le Sahara, à « changer de pays » ou à se tourner vers d’autres pays tels que le Maroc.
Pour la première fois depuis le changement de position sur le Sahara, le gouvernement espagnol reconnaît avoir sous-estimé les conséquences de cette décision sur les relations commerciales avec l’Algérie, son principal fournisseur de gaz, qui a suspendu en juillet le traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération avec l’Espagne. Désormais, l’exécutif espagnol souhaite se tourner vers le Maroc, selon El Independiente, qui précise que le ministère du Commerce a demandé aux hommes d’affaires touchés par la crise avec Alger de « changer de pays » ou de se tourner vers le Maroc.
Pour les milieux d’affaires, cette décision unilatérale de Pedro Sanchez visait simplement à « satisfaire les exigences du Maroc », sans tenir compte des conséquences sur les relations avec l’Algérie. Les entreprises espagnoles ayant des activités en Algérie ont déjà accumulé des pertes de plus de 600 millions d’euros, indiquent des sources consultées, ajoutant que la situation ne fait qu’empirer. Les exportations de l’Espagne vers l’Algérie se sont établies à 2,7 milliards d’euros en 2021, contre près de 9,5 milliards d’euros pour les exportations vers le Maroc, selon les données du ministère espagnol du Commerce qui montrent une chute progressive des exportations vers Alger.
Lors de la réunion de haut niveau entre l’Espagne et le Maroc, qui s’est tenue à Rabat les 1er et 2 février, les deux pays ont signé une vingtaine de protocoles d’accord dans divers domaines et un protocole financier de 800 millions d’euros pour faciliter les investissements espagnols au Maroc. Les entreprises espagnoles Talgo et Construcciones y Auxiliar de Ferrocarriles (CAF) ont exprimé leur intérêt pour l’achat de 80 à 100 nouveaux trains d’une vitesse de 200 km/h par le Maroc. D’autres pourraient également se positionner sur le projet d’extension de la ligne à grande vitesse Kenitra-Marrakech, tandis qu’Acciona pourrait construire des usines de dessalement dans le royaume.
Pour certains hommes d’affaires, « la pandémie de Covid-19 et le changement de président » ont contribué à un « refroidissement significatif de l’économie algérienne », qui est « la seule et principale cause directe de la réduction des importations en provenance d’Algérie au niveau général et non spécifique au marché espagnol ». Les hommes d’affaires craignent de tout perdre si rien n’est fait pour normaliser les relations avec l’Algérie. selon un entrepreneur Espagnole en Algérie : « La suspension des relations commerciales entre l’Algérie et l’Espagne a eu un impact désastreux sur nos entreprises. Le conseil que je donnerais à mes collègues est de ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier et d’explorer d’autres opportunités dans d’autres pays, comme le Maroc par exemple. Nous ne pouvons pas nous permettre de dépendre d’un seul marché et de prendre le risque de tout perdre en cas de crise politique ou économique. » De son côté, le gouvernement espagnol souligne que « les intérêts commerciaux avec le Maroc sont plus importants que ceux de l’Algérie » .
Malgré les conséquences économiques négatives pour les entreprises espagnoles en Algérie, le gouvernement espagnol semble vouloir se concentrer sur ses relations commerciales avec le Maroc, qui représente un marché plus important pour l’Espagne. Toutefois, certains hommes d’affaires restent inquiets quant à l’impact de la suspension des relations commerciales avec l’Algérie et appellent à la normalisation des relations. Dans ce contexte, le Maroc semble être un choix stratégique pour l’Espagne qui a signé plusieurs accords de coopération économique avec le royaume lors d’une réunion de haut niveau en février. Il reste à voir si cette orientation commerciale de l’Espagne sera payante à long terme.