Dans un climat de forte incertitude économique, l’or vient de battre un record historique. Pour la première fois, ce mardi, l’once d’or a dépassé les 3500 dollars, atteignant un pic inédit à 3500,10 dollars avant de redescendre légèrement à 3493,41 dollars en transactions au comptant, soit une hausse de 2,2 %. Les contrats à terme américains sur l’or ont également progressé de 2,3 %, pour atteindre 2502,40 dollars.
Ce bond spectaculaire du métal précieux reflète l’inquiétude croissante des investisseurs face aux tensions politiques et économiques aux États-Unis, notamment les vives critiques du président Donald Trump à l’encontre du président de la Réserve fédérale, Jerome Powell. Trump accuse Powell de paralyser l’économie en maintenant les taux d’intérêt inchangés, malgré les incertitudes liées aux politiques douanières.
Le marché perçoit ces frictions comme un signe de fragilité institutionnelle, incitant les investisseurs à délaisser les actifs américains au profit des valeurs refuges comme l’or. « Les investisseurs fuient de plus en plus les actifs américains face à la confusion sur les tarifs douaniers et les tensions entre Trump et Powell. L’or est dans une position idéale pour tirer profit de la faiblesse du dollar », analyse Tim Waterer, chef de marché chez KCM Trade.
Depuis le début de l’année, le cours de l’or a bondi d’environ 33 %, un chiffre qui souligne son rôle de refuge par excellence en période de turbulence.
Les autres métaux précieux ont également profité de cette dynamique : la silver a augmenté de 0,3 % pour atteindre 32,80 dollars l’once, le platine a grimpé de 1,1 % à 972,20 dollars, tandis que le palladium a progressé de 2,2 % pour s’établir à 948,14 dollars.
Sur le plan géopolitique, la tension est à son comble et les répercussions économiques s’enchaînent à un rythme alarmant. Les marchés asiatiques, qui constituent l’un des baromètres les plus sensibles de la stabilité financière mondiale, vacillent sous l’effet d’une vente précipitée et massive d’actifs libellés en dollars, révélatrice d’un désengagement progressif vis-à-vis des actifs américains. En cause : une défiance croissante envers la capacité des États-Unis à maintenir une ligne économique cohérente dans un contexte de plus en plus politisé.
La réaction virulente de la Chine ne s’est pas fait attendre. Pékin, par la voix de ses représentants officiels, a accusé Washington de manipuler l’arme tarifaire à des fins de pression géopolitique, dénonçant une utilisation abusive des droits de douane comme levier stratégique pour affaiblir ses partenaires commerciaux. Plus inquiétant encore, la Chine a mis en garde les pays tiers contre la signature d’accords économiques qu’elle juge déséquilibrés et néfastes à la souveraineté de leurs politiques industrielles. Une déclaration qui sonne comme un avertissement direct à plusieurs économies émergentes courtisées par Washington.
Dans ce climat électrique, les investisseurs scrutent désormais les moindres signaux émis par les membres de la Réserve fédérale, espérant des éclaircissements sur la trajectoire monétaire à venir. Mais cette attente fébrile ne fait qu’ajouter à la volatilité ambiante.
L’or, quant à lui, s’impose plus que jamais comme une valeur refuge incontestable. En dépassant les 3500 dollars l’once, le métal jaune n’est plus seulement un indicateur économique : il devient le symptôme d’une défiance globale à l’égard des équilibres politiques et monétaires actuels. Face aux incertitudes liées aux tensions sino-américaines, aux rivalités internes à la politique américaine, et à la perspective d’un ralentissement économique, les investisseurs préfèrent miser sur la sécurité tangible d’un actif millénaire plutôt que sur la promesse incertaine des devises fiat.
L’or ne brille plus uniquement par sa rareté. Il brille aujourd’hui comme le reflet d’un monde désorienté, où la prudence a désormais valeur de stratégie.
Par Salma Semmar
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