Quelques heures à peine après l’entrée en fonction de François Bayrou comme Premier ministre, l’agence de notation Moody’s a abaissé la note souveraine de la France de Aa2 à Aa3. Cette décision, justifiée par une « fragmentation politique » croissante et des perspectives budgétaires incertaines, ajoute un défi de taille au nouveau gouvernement, déjà confronté à une situation économique tendue.
Une décision attendue, mais un timing surprenant
La dégradation intervient dans un contexte de crise politique. Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en juin dernier, suivie de la censure du gouvernement de Michel Barnier, la France traverse une période d’instabilité. Si Moody’s avait déjà placé la note sous perspective négative en octobre, peu s’attendaient à une action aussi rapide après la nomination de François Bayrou.
L’agence justifie sa décision par des prévisions budgétaires pessimistes : elle anticipe un déficit public stagnant à 6,3 % du PIB en 2025 et à 5,2 % en 2027, bien au-delà des objectifs fixés par le précédent gouvernement. La dette publique, quant à elle, devrait atteindre 120 % du PIB en 2027, contre 113,3 % en 2024. Moody’s estime que la fragmentation politique actuelle limite la capacité du gouvernement à mener des réformes ambitieuses et à consolider les finances publiques.
Bercy tente de rassurer
Le ministre des Finances, Antoine Armand, a rapidement réagi en déclarant « prendre acte » de cette dégradation, tout en affirmant que la nomination de François Bayrou constituait une réponse claire aux inquiétudes exprimées par Moody’s. Il a rappelé l’importance des réformes budgétaires pour rétablir la confiance des marchés et des agences de notation.
Cependant, les marges de manœuvre semblent réduites. Alors que Michel Barnier avait prévu un retour progressif sous le seuil de déficit de 3 % du PIB d’ici 2029, Moody’s juge cette trajectoire peu crédible.
Un défi moral et financier pour François Bayrou
Lors de la passation de pouvoir avec Michel Barnier, François Bayrou a exprimé sa conscience aiguë des enjeux liés à la dette publique. Il a souligné que cette situation, fruit de « décennies entières » de gestion budgétaire insuffisante, nécessitait des décisions courageuses et transparentes.
Bayrou, connu pour son discours de longue date sur les dangers de la dette, a promis de ne rien cacher et de ne négliger aucun levier pour tenter d’inverser la tendance. Il a toutefois reconnu l’ampleur du défi, évoquant les « risques inconsidérés » qu’il avait pris par le passé pour porter cette question au cœur du débat public, souvent au prix de critiques.
Les marchés surveillent de près
Malgré la dégradation, la note Aa3 reste une note de haute qualité. Cependant, cette décision aligne désormais Moody’s avec ses concurrents S&P et Fitch, qui classent également la France à un niveau similaire avec des perspectives négatives ou stables. Cela reflète une confiance érodée dans la capacité de l’Hexagone à redresser ses finances publiques.
Avec cette situation, François Bayrou entame son mandat à Matignon sous pression, avec la lourde tâche de restaurer la crédibilité budgétaire de la France tout en gérant une situation politique fragmentée.
.
.