Sans généraliser ni porter de jugement hâtif, l’image de certaines chanteuses marocaines est bousculée par une série d’affaires judiciaires qui interrogent les frontières entre show-business et argent illicite. Deux dossiers, en particulier, jettent une ombre sur la profession et relancent le débat sur l’éthique des engagements artistiques.
Latifa Raafat entendue par la justice. La star a récemment témoigné durant plusieurs heures devant un tribunal dans le cadre d’une instruction portant sur des trafics présumés et des soupçons de blanchiment d’argent. Au centre du dossier, son ex-mari est cité par les enquêteurs. Raafat, elle, a comparu en qualité de témoin, rappelant la règle cardinale de la présomption d’innocence et la nécessité de laisser la justice suivre son cours.
Le dossier du “mariage fastueux”. Dans une autre affaire, Dounia Batma et Zina Daoudia figurent parmi les artistes invités à animer une fête nuptiale liée, selon l’enquête, à un individu soupçonné d’être une figure majeure d’un réseau de drogue. Les chanteuses sont attendues pour témoigner sur les cachets perçus et d’éventuels cadeaux de valeur. Là encore, la précision s’impose : il ne s’agit pas d’un procès de l’intention, mais de vérifications judiciaires sur la provenance des fonds.
L’appât du gain, angle mort de la profession. Ces deux séquences posent une question simple : que sait-on de ceux qui financent ? Dans un secteur où les contrats peuvent être négociés à la hâte, l’argent facile n’a ni odeur ni couleur… jusqu’au jour où surgissent les soupçons. La récente sortie de prison de Dounia Batma, après une autre affaire (cyberharcèlement), souligne combien la prudence et la traçabilité devraient devenir des réflexes professionnels.
Un enjeu de réputation collective. Quand des artistes se retrouvent, même indirectement, au cœur d’enquêtes liées à des fonds suspects, c’est toute la filière qui vacille : managers, agents, producteurs, maisons d’événementiel. D’où l’urgence d’outils concrets : clauses de conformité dans les contrats (KYC basique du payeur), refus des paiements en espèces au-delà de seuils, recours systématique aux virements traçables, et codes de conduite portés par les syndicats et associations professionnelles.
Moralité provisoire. La chanson marocaine mérite mieux que des soupçons récurrents. Protéger la scène et ses talents exige de conjuguer exigence artistique et hygiène financière. La justice dira le droit ; aux professionnels de se doter, dès maintenant, de garde-fous pour que la fête ne vire plus à la zone grise.
Par Salma Semmar