Le cinéma algérien, et avec lui tout un pan du cinéma arabe et africain, est en deuil. Mohamed Lakhdar Hamina, réalisateur légendaire et seul cinéaste du continent à avoir remporté la Palme d’or du Festival de Cannes, s’est éteint vendredi à l’âge de 95 ans, à son domicile d’Alger, a annoncé sa famille.
Le destin a voulu qu’il disparaisse le jour même où Cannes Classics célébrait le cinquantenaire de la Palme d’or qu’il reçut en 1975 pour son chef-d’œuvre « Chronique des années de braise », œuvre monumentale et poignante sur la lutte du peuple algérien pour son indépendance. Ce film, fresque de près de trois heures divisée en six tableaux, avait à l’époque bouleversé la Croisette et propulsé son auteur au rang de réalisateur de stature mondiale.
Autodidacte passionné, Lakhdar Hamina s’était formé sur le terrain, après un passage dans les actualités tunisiennes, et s’était imposé très tôt comme un pionnier du cinéma engagé. Lauréat également du prix de la première œuvre à Cannes en 1967 pour « Le Vent des Aurès », il fut un porte-voix artistique de la mémoire algérienne.
Son parcours personnel est à la hauteur de son œuvre : né en 1934 dans une famille modeste de M’sila, il vivra la douleur de voir son père assassiné par l’armée coloniale. Appelé en 1958, il rejoindra les rangs de la résistance à Tunis. Ce combat, il le portera ensuite à l’écran, transformant le cinéma en instrument de libération des mémoires.
Sa disparition laisse un vide immense dans le monde du 7e art, mais son héritage, lui, restera vivant. À travers ses films, Mohamed Lakhdar Hamina aura raconté l’Algérie, ses douleurs, sa dignité, et sa conquête de la liberté.