Dans le système bancaire marocain, rares sont ceux qui affirmeront que le client y occupe réellement une place privilégiée. Dans les agences comme dans les services centraux, l’usager n’est pas considéré comme un partenaire à protéger et à accompagner, mais trop souvent comme un simple numéro soumis à des procédures impersonnelles, en particulier lorsque son compte n’est pas généreusement provisionné.
Personne ne vous croira si vous prétendez qu’une banque marocaine se distingue par un accueil irréprochable ou une attention particulière envers les clients aux revenus modestes. Dans les faits, les établissements financiers semblent uniformément distants, appliquant les mêmes pratiques et reproduisant un modèle relationnel où la chaleur humaine et l’écoute ne sont pas des priorités.
S’il existait un classement annuel des banques les plus conviviales du Royaume, le résultat ferait sourire : toutes occuperaient probablement le même rang, tant aucune n’incarne réellement l’idée de « friendly bank », capable de rassurer, conseiller et valoriser ses clients au lieu de les intimider par des formalités rigides et un ton parfois méprisant.
Les incidents, les malentendus et les comportements hautains se multiplient dans plusieurs agences du pays. Les scandales nés d’erreurs, de négligences ou d’abus de pouvoir n’ont manifestement pas suffi à instaurer un code de conduite strict et commun, garantissant une relation clientèle digne de ce nom, qu’il s’agisse d’un client fortuné, de classe moyenne ou en situation précaire.
À cela s’ajoute un problème structurel trop souvent passé sous silence : le manque de formation en relation client. Beaucoup d’agents bancaires — guichetiers, conseillers, chefs de service — ne bénéficient pas d’une formation continue en communication, en écoute active ou en gestion du stress. Résultat : un service expéditif, des explications confuses, un ton sec, parfois même une attitude défensive à la moindre question. La moindre opération banale peut ainsi devenir une source de tension inutile.
Un autre élément contribue à dégrader la qualité du service : la pression des objectifs commerciaux. Dans de nombreuses banques, les employés sont soumis à des quotas trimestriels — parfois mensuels — concernant la vente de cartes, d’assurances ou de crédits. Sous pression constante, certains privilégient la rentabilité immédiate au détriment de la relation humaine. Ce système encourage une hiérarchisation implicite des clients : les « rentables » sont choyés, les autres relégués, ce qui renforce un sentiment d’injustice et d’exclusion.
Une question s’impose alors : est-ce trop demander aux directeurs d’agences, souvent retranchés derrière leurs bureaux inaccessibles et leurs coffres-forts symboliques, de descendre quelques minutes pour saluer un client, écouter ses doléances ou simplement créer un lien humain ? Cette proximité serait-elle contraire à leur culture professionnelle ou à leur déontologie ? Ou bien s’agit-il d’une habitude profondément ancrée dans un système bancaire qui tarde à se moderniser, non sur le plan technologique — où les progrès sont réels — mais sur celui de la relation humaine, pourtant au cœur du métier ?
Par Mounir Ghazali
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