À Marrakech, un jeune poissonnier nommé Abdelilah a récemment suscité l’intérêt en proposant des sardines à un prix défiant toute concurrence : 5 dirhams le kilogramme. Cette initiative a surpris de nombreux consommateurs, surtout dans un contexte où le prix de ce poisson oscille généralement entre 15 et 20 dirhams dans les villes côtières comme Casablanca et Rabat.
Abdelilah, surnommé le « conquérant des intermédiaires », a ouvert sa boutique « Le Port de Marrakech » dans une ville située loin des côtes. Son objectif est de rendre le poisson plus accessible aux habitants de l’intérieur du pays. Cette démarche a attiré une clientèle nombreuse, comme en témoignent les vidéos partagées sur les réseaux sociaux.
Cette initiative a également suscité des réactions variées parmi les professionnels du secteur. Certains concurrents suggèrent qu’il pourrait s’agir de poisson congelé ou de sardines de moindre qualité, habituellement destinées à la production de farine de poisson et vendues à bas prix dans les ports. D’autres estiment qu’il s’agit d’une stratégie marketing visant à accroître sa notoriété sur les réseaux sociaux, un pari potentiellement rentable, car la visibilité générée en ligne peut attirer une clientèle encore plus large et générer des revenus publicitaires conséquents. En effet, les plateformes sociales permettent aujourd’hui de monétiser le contenu viral, et les retombées financières pourraient largement compenser toute éventuelle perte sur la vente des sardines.
Selon Abderrahim Habza, vice-président de la Chambre maritime d’Agadir et président du groupe HBZ, le prix de la sardine est généralement déterminé par l’offre et la demande lors des enchères dans les ports. Même en cas de pénurie, le prix maximal atteint rarement 10 dirhams par kilogramme. Il souligne également que la chaîne de distribution, incluant plusieurs intermédiaires, contribue à l’augmentation des prix avant que le produit n’arrive chez le consommateur final.
L’initiative d’Abdelilah intervient à un moment où les prix des produits alimentaires connaissent une hausse notable, notamment à l’approche du Ramadan. Cette situation relance le débat sur le rôle des intermédiaires et la nécessité de revoir les circuits de distribution pour offrir des produits de qualité à des prix abordables aux consommateurs marocains.
Avec son initiative audacieuse, le jeune Abdelilah a mis en lumière un paradoxe qui interroge : comment un pays bordé par 3 500 km de côtes peut-il voir le prix des sardines, considérées comme le poisson du peuple, flamber au point de devenir inaccessibles pour de nombreux Marocains ? Son action, qu’elle relève du simple coup marketing ou d’un réel engagement contre la spéculation, a provoqué un débat essentiel sur la cherté des produits de la mer et le rôle des intermédiaires. À travers cette polémique, il a rappelé une réalité évidente : il est urgent de garantir un accès équitable aux ressources halieutiques du pays, et de réformer en profondeur un marché qui semble déconnecté des richesses naturelles du Maroc.
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