L’argent continue de couler à flots dans le football marocain à l’approche de la Coupe d’Afrique des Nations 2025-26 et du Mondial 2030. Si la construction de stades de très haut niveau est légitime et suscite la fierté, certaines dépenses annexes interrogent. Elles ouvrent une ère de gaspillage qui ne dit pas son nom.
À l’occasion de l’inauguration du nouveau Grand Stade Moulay Abdellah de Rabat, considéré comme l’un des plus beaux au monde, une méga fête a été organisée. Pas moins de 300 tables y ont été dressées hier, mardi, pour accueillir ouvriers et cadres ayant participé à l’édification de ce bijou, construit en un temps record de 15 mois par une entreprise marocaine, et 100 autres tables sont prévues aujourd’hui. Sur les réseaux sociaux, les images de cet événement circulent déjà, suscitant autant d’admiration que de perplexité.
Certes, on pouvait s’attendre à voir les ouvriers mis à l’honneur et applaudis par le public lors de l’inauguration et du match des Lions de l’Atlas contre le Niger. Mais la facture de ce festin reste floue. Est-ce l’entreprise et ses partenaires qui ont voulu récompenser leurs équipes en offrant ce banquet et, peut-être, des primes généreuses ? Ou bien s’agit-il d’une dépense imputée, directement ou indirectement, à l’argent public ?
Au-delà de cette célébration, des questions plus profondes émergent. La Fédération royale marocaine de football prévoit de réserver ce stade, qui a coûté une somme astronomique, aux seuls matchs internationaux de l’équipe nationale, laissant les rencontres du championnat au stade olympique voisin. Une telle infrastructure, financée à prix d’or, était-elle concevable pour des usages limités, au moment où tant de régions souffrent encore d’inégalités criantes et de manque d’équipements de base ?
L’exemple grec des années 2000 plane comme une mise en garde : ces projets pharaoniques, portés par la passion sportive, peuvent aggraver lourdement la dette du pays. La vraie question reste entière : qui paiera la facture ?
En définitive, la Fédération Royale Marocaine de Football démontre qu’elle ne lésine pas sur les moyens, peu importe l’ampleur des budgets engagés. L’objectif affiché reste clair : relever avec brio le défi de faire du Maroc une vitrine sportive mondiale, à la hauteur de la CAN 2025 et du Mondial 2030. Une ambition qui suscite admiration pour sa détermination, mais qui interroge tout autant sur la soutenabilité de tels investissements.
Par Jalil Nouri