Le Conseil de sécurité des Nations Unies vient de reconnaître officiellement le plan d’autonomie présenté par le Royaume comme la base « la plus sérieuse et réaliste » pour résoudre la question du Sahara.Mais au-delà de la victoire diplomatique, un autre événement, plus silencieux mais tout aussi puissant, s’est produit : dans son discours, le Roi Mohammed VI a tendu la main à son homologue algérien, l’invitant à « surmonter les différences » pour bâtir de nouvelles relations fondées sur la confiance, la fraternité et le bon voisinage.
Et si cette phrase marquait le début d’un processus thérapeutique collectif ?
Depuis un demi-siècle, la question du Sahara a figé les imaginaires, saturé les récits, fracturé les appartenances. Pour un psychiatre, ce n’est pas seulement un conflit territorial : c’est une blessure symbolique, transmise de génération en génération, avec ses défenses, ses silences et ses identifications.
Les peuples, comme les individus, développent des mécanismes de survie : la méfiance, la rigidité, la peur de l’humiliation, l’impossibilité de dire « je » sans dire « contre l’autre ».Aujourd’hui, le Maroc propose autre chose : une reconnaissance de soi qui n’a plus besoin d’exclure l’autre.
La reconnaissance internationale du plan d’autonomie agit ici comme un moment de “ré-intégration psychique” : une étape où un sujet, après des décennies de lutte pour être entendu, se voit enfin reconnu dans sa légitimité.Mais en psychiatrie, la reconnaissance ne suffit pas : il faut ensuite réapprendre à vivre sans le conflit. C’est peut-être le défi du Maroc aujourd’hui : transformer la logique de défense en logique de confiance.
Et le message royal à l’Algérie, loin d’être une formule diplomatique, s’inscrit dans ce même mouvement : oser dépasser la rancune historique, oser parler de fraternité dans un monde où l’hostilité rapporte encore plus d’applaudissements.Sur le plan collectif, cette main tendue représente un passage symbolique de la survie à la maturité.Car la vraie force d’une nation ne réside pas seulement dans la reconnaissance de ses frontières, mais dans la capacité de son peuple à élargir ses frontières intérieures : celles de la peur, du ressentiment, du repli.
Le Sahara marocain ne doit pas seulement être un espace de souveraineté, mais un territoire de réconciliation : avec son histoire, ses différences, ses blessures.Il y a, dans ce moment politique, un enseignement universel : toute guérison commence par une phrase simple : “Je ne veux plus être défini par ce qui m’a opposé à toi.”
C’est le début d’un travail psychique — lent, exigeant, profond — que connaissent bien les thérapeutes : celui du pardon lucide, de la confiance reconstruite, de la dignité partagée.
Si cette résolution onusienne ouvre un nouveau chapitre pour le Maroc, elle rappelle surtout que la paix extérieure naît toujours d’une paix intérieure.Et qu’entre États, comme entre êtres humains, il n’y a pas de victoire durable sans reconnaissance réciproque.
Par Dr Wadih Rhondali, Médecin psychiatre — Chroniqueur santé mentale et société










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