Un fonctionnaire du ministère de l’Économie français, connu sous le nom de « Bercy », a été mis en examen le 19 décembre dernier, soupçonné d’avoir transmis des informations sensibles sur des opposants au régime algérien résidant en France. L’affaire, révélée par plusieurs sources concordantes, met en lumière une possible infiltration des renseignements algériens au sein de l’administration française.
Le parquet de Paris a confirmé que le suspect est poursuivi pour « intelligence avec une puissance étrangère », « livraison à une puissance étrangère d’information sur intérêt fondamental à la nation » et « exercice d’activités pour s’informer sur les intérêts fondamentaux de la nation pour une puissance étrangère ».
Des informations sensibles transmises au consulat d’Algérie
L’enquête a révélé que ce fonctionnaire de Bercy était en contact régulier avec un employé du consulat d’Algérie à Créteil. Il aurait fourni à ce dernier des données personnelles et des informations sur les demandes d’asile d’opposants politiques algériens, parmi lesquels des figures connues comme Amir Boukhors et Mohamed Larbi Zitout, tous deux sous mandat d’arrêt international pour terrorisme, ainsi que d’autres personnalités influentes telles que l’influenceur Chawki Benzehra et un journaliste réfugié en France.
D’après une source proche de l’enquête, plusieurs de ces individus auraient été victimes de violences, de menaces de mort ou de tentatives d’enlèvement, bien que le lien entre ces faits et les informations transmises par le fonctionnaire français n’ait pas été confirmé.
Une manipulation ou une trahison ?
L’avocat du suspect, Me Sipan Ohanians, a affirmé que son client était « victime d’une campagne de menaces et de manipulation d’une puissance étrangère ayant resserré l’étau autour de lui ».
Quant à l’Algérien du consulat de Créteil, il n’a pas été mis en examen, bien que les enquêteurs le soupçonnent d’être un agent des renseignements algériens agissant sous couverture diplomatique.
Une complicité interne
L’affaire a pris une tournure encore plus complexe avec l’implication d’une assistante sociale de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii). Selon les enquêteurs, le fonctionnaire de Bercy aurait entretenu une « relation intime » avec cette quadragénaire, lui permettant ainsi d’accéder à un logiciel confidentiel pour collecter des informations.
Mise en examen le 7 février pour violation du secret professionnel, cette dernière a nié toute rémunération en échange de ses services, selon son avocat, Me Fabien Arakelian.
Une enquête qui s’étend
L’affaire a été initialement signalée en juin 2024, lorsque la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) a découvert des liens suspects entre l’employé de Bercy et un fonctionnaire algérien. En novembre, le dossier a été confié à deux juges d’instruction qui ont retenu plusieurs chefs d’inculpation, dont « soustraction et divulgation de secret défense nationale » et « provocation à un crime de trahison ou espionnage non suivie d’effet ».
Cette affaire soulève de nombreuses interrogations sur la sécurité des données sensibles au sein de l’administration française et sur les tentatives d’ingérence étrangère dans la politique d’asile et de protection des opposants politiques réfugiés en France.
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