Le débat s’emballe après la sortie d’Amine Tahraoui. Devant la Commission des secteurs sociaux, le ministre de la Santé et de la Protection sociale a annoncé la suspension des subventions publiques à l’investissement destinées aux cliniques privées—des montants évoqués à « plusieurs millions de dirhams »—au nom d’une « révision du partenariat » et d’une future carte sanitaire plus « scientifique et technique ». Dans la foulée, l’Association nationale des cliniques privées (ANCP) a démenti toute perception d’aides par ses affiliés et dénoncé un amalgame susceptible d’induire l’opinion publique en erreur. Elle réclame la publication intégrale de la liste des établissements bénéficiaires, des montants et des bases légales.
La polémique a pris un tour politique. Abdellah Bouanou (PJD) a saisi le ministre par une question écrite : combien d’aides ont été versées, de quelle nature, sur quel fondement, et à quelles cliniques ? En écho, le groupe Akdital, coté à Casablanca, affirme n’avoir reçu aucune aide—directe ou indirecte—et détaille un financement fondé sur fonds propres, emprunts bancaires et marchés financiers ; il soutient la demande de transparence et souligne l’éligibilité théorique aux incitations de la Charte de l’investissement, au regard des emplois créés et de l’extension territoriale (y compris dans les provinces du Sud).
Du côté du ministère, la ligne est claire : stopper les effets d’aubaine et mieux réguler l’implantation des cliniques, jugées parfois concurrentes « face aux CHU » sans résoudre les goulets d’étranglement ; lutter contre les abus (surfacturations, dossiers gonflés) via une vingtaine de commissions d’inspection actives chaque mois ; et intégrer le privé dans la planification à cinq ans selon la démographie et les besoins réels, plutôt qu’au fil des opportunités foncières.
Au fond, le bras de fer révèle deux narratifs. Pour le ministère, il s’agit d’un recadrage : rationaliser l’offre, garantir l’intérêt général et contenir une prédominance privée perçue comme déséquilibrante. Pour l’ANCP et plusieurs groupes, la priorité est la prévisibilité des règles, la reconnaissance du rôle complémentaire du privé et la clarté des chiffres pour éviter la suspicion généralisée. La sortie par le haut passe par un triptyque : publication des données (listes, montants, textes), concertation formalisée (calendrier, critères d’implantation, tarifs de référence) et contrôle renforcé — au public comme au privé. Sans cela, le risque est double : une judiciarisation du débat et une paralysie de l’investissement à l’heure où le pays cherche à réduire les délais d’accès aux soins.
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