Bonne nouvelle pour l’intégration euro-méditerranéenne : le tunnel sous le détroit de Gibraltar vient de franchir une étape décisive. La société allemande Herrenknecht, référence mondiale du creusement, a remis à la SECEGSA (ministère espagnol des Transports) une étude confirmant la faisabilité technique de l’ouvrage, malgré la complexité du sous-sol, notamment au niveau du seuil de Camarinal, jusqu’ici principal point noir. Autrement dit : avec les technologies disponibles aujourd’hui, le lien fixe Europe–Afrique est réalisable.
C’est un tournant pour un projet imaginé depuis les années 1970. Madrid et Rabat ont d’ores et déjà calé un calendrier de décision : une mise à jour finale du projet en 2026, puis une décision conjointe en 2027 sur l’appel d’offres des tunnels exploratoires, étape préalable au percement définitif. Ce feu vert technique intervient alors que le gouvernement de Pedro Sánchez affiche un soutien assumé, porté par des financements européens “Next Generation”.
Un chantier en deux temps, des coûts chiffrés
Le scénario de référence prévoit d’abord le tunnel exploratoire, dont la construction prendrait 6 à 9 ans. Côté espagnol, le tracé représenterait environ 40 km sur un total d’environ 65 km. Le terminal serait implanté près de Vejer de la Frontera, avec raccordement au réseau national via une nouvelle jonction avec la ligne Cadix–Séville.
Le coût de base de la partie espagnole (exploratoire + définitif + terminal et connexes) est évalué à plus de 8,5 milliards d’euros, hors rallonges et apports européens additionnels. Un chiffrage global affinera la part marocaine une fois l’ingénierie de détail arrêtée.
Quels horizons ?
Les projections les plus optimistes évoquent des premiers jalons autour de 2030, en écho à la Coupe du monde 2030 co-organisée par le Maroc, l’Espagne et le Portugal. Les scénarios prudents situent toutefois une mise en service entre 2035 et 2040, compte tenu des défis techniques, financiers et environnementaux.
Un modèle économique inspiré du tunnel sous la Manche
Le ministère espagnol des Transports a mandaté Ineco pour tester la rentabilité du corridor : flux passagers et fret, schéma de concession à l’image du tunnel sous la Manche ou de la ligne TGV Figueres–Perpignan, et comparaison des options terminales (Algésiras ou Tarifa). Outre les péages, l’infrastructure pourrait générer des revenus connexes via une interconnexion électrique et le passage de fibres optiques, renforçant son attractivité pour les investisseurs.
Un hub stratégique entre deux continents
Pour ses partisans, ce tunnel ferait de la péninsule Ibérique et du Maroc un nœud logistique intercontinental, accélérant les échanges, la mobilité étudiante et touristique, et l’intégration des chaînes de valeur industrielles entre Europe et Afrique. La validation technique d’Herrenknecht relance ainsi un dossier longtemps différé : la prochaine séquence se jouera sur le montage financier, la gouvernance binationale et la maîtrise des risques géologiques.
Quoi qu’il en soit, la bonne nouvelle est là : le lien fixe Maroc–Espagne n’est plus un rêve d’ingénieur, mais un projet engageant son passage à l’exécution.










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