Ce qui aurait dû être un moment de joie et de fierté pour les élèves du lycée Émile Max à Schaerbeek, en Belgique, s’est transformé en scène de malaise et de controverse. Deux jeunes filles voilées se sont vues interdire l’accès au podium lors de leur cérémonie de remise de diplômes jeudi dernier, au motif qu’elles portaient un signe convictionnel interdit par le règlement intérieur de l’établissement. L’événement, tenu dans la Maison communale, a provoqué une vague d’indignation après la diffusion d’une vidéo montrant les deux élèves applaudies par le public mais reléguées au fond de la salle, privées du droit symbolique de recevoir publiquement leur diplôme.
Pour Hamile, l’une des élèves concernées, la blessure est profonde. Dans un témoignage émouvant recueilli par la RTBF, elle confie :
« Pour la première fois de ma vie, j’ai ressenti l’humiliation du ‘je ne suis pas comme vous’ ».
Les mots résonnent comme un reflet du mal-être vécu par de nombreux jeunes confrontés à des choix identitaires dans un cadre scolaire souvent rigide. La scène, bien que conforme au règlement de l’école, soulève une question plus large : faut-il sacrifier l’inclusivité au nom de la neutralité ?
Selon Thomas Eraly (Ecolo-Groen), échevin de l’enseignement à Schaerbeek, la direction de l’école n’a fait qu’appliquer le règlement d’ordre intérieur voté par le conseil communal, qui interdit tout signe convictionnel pendant les temps scolaires, y compris lors des sorties et des cérémonies officielles. Il reconnaît néanmoins que cette application stricte a pu créer une exclusion ressentie comme violente, et annonce une réflexion à venir avec les équipes pédagogiques pour éviter la reproduction de telles situations.
Du côté politique, la réaction ne s’est pas fait attendre. Le Parti Socialiste local a vivement critiqué l’attitude de l’établissement et de la commune, dénonçant une « interprétation zélée et stigmatisante » du règlement. Dans un communiqué, il qualifie la scène de « faute » et réclame des excuses publiques à l’égard des deux élèves exclues de la proclamation.
L’affaire relance le vieux débat entre neutralité, liberté de conviction, et inclusivité à l’école. Elle met en lumière une tension récurrente dans la société belge : comment concilier respect des règles communes et reconnaissance des identités plurielles, sans stigmatiser ni exclure ? Ce que certaines voient comme un simple respect du cadre, d’autres le vivent comme une injustice à fort pouvoir symbolique.
Au-delà de l’émotion suscitée, c’est toute une réflexion sur le vivre-ensemble scolaire qui doit être remise sur la table, avec sérénité, bienveillance et écoute.