Près de trois ans après leur acquittement en première instance, Michel Platini et Sepp Blatter se retrouvent à nouveau devant la justice suisse. Ce lundi, la Cour d’appel extraordinaire du Tribunal pénal fédéral de Muttenz (près de Bâle) examine l’affaire du paiement suspect de 2 millions de francs suisses, un dossier qui a précipité la chute des deux hommes en 2015.
Jusqu’à jeudi, la justice helvétique devra déterminer si Platini et Blatter ont bien orchestré une manœuvre frauduleuse pour obtenir ce versement, ou s’il s’agissait simplement d’un accord oral non formalisé. Une condamnation pourrait leur valoir jusqu’à cinq ans de prison, et le verdict final est attendu pour le 25 mars.
Un dossier mêlant droit et politique
Ce procès en appel marque l’aboutissement de 25 ans de relations troubles entre les deux figures du football mondial. Alliés dans les années 1990, puis adversaires dans la course au pouvoir, Michel Platini et Sepp Blatter ont finalement été évincés ensemble du monde du football à la suite de cette affaire.
Les faits sont établis : entre 1998 et 2002, Michel Platini a bien travaillé en tant que conseiller de Blatter pour la FIFA, avec un salaire annuel de 300 000 francs suisses payé en intégralité. Pourtant, en 2011, soit huit ans après la fin de cette mission, Platini réclame et obtient un versement de 2 millions de francs suisses, validé par Blatter.
Pour l’accusation, ce paiement tardif était une fraude destinée à contourner les contrôles internes de la FIFA, et donc un cas d’escroquerie.
Un accord oral au centre des débats
Face aux juges, Platini et Blatter défendent une version différente des faits. Selon eux, il s’agissait d’un salaire différé, convenu dès le départ mais dont le versement aurait été retardé pour des raisons financières.
Blatter et Platini affirment que cet accord oral, jamais formalisé par écrit, portait sur une rémunération d’un million de francs suisses par an.
« Quand Sepp Blatter m’a demandé combien je voulais, j’ai répondu : ‘Un million’. Il m’a demandé : ‘Un million de quoi ?’ J’ai plaisanté en disant : ‘Des pesetas, des lires, des roubles, des marks… c’est toi qui décides’ », avait raconté Platini lors du premier procès.
Blatter avait confirmé cette version, assurant que cet accord reposait sur une « poignée de main entre gentlemen », sans témoin ni trace comptable.
Infantino, l’ombre d’un successeur opportuniste
Ce scandale a marqué la fin de l’ère Blatter et a empêché Michel Platini de briguer la présidence de la FIFA, un poste qui semblait lui être destiné. Les deux accusés estiment que cette affaire n’est pas seulement judiciaire, mais aussi politique, pointant du doigt le rôle de Gianni Infantino, ex-bras droit de Platini à l’UEFA et élu à la tête de la FIFA en 2016.
Infantino lui-même avait été inquiété par la justice suisse en 2020 pour des rencontres secrètes avec le chef du parquet helvétique, avant que l’affaire ne soit classée sans suite en 2023.
Un procès décisif pour l’avenir des deux hommes
Bien que blanchis en 2022, Platini et Blatter espèrent obtenir une confirmation de leur acquittement, mettant ainsi un terme définitif à cette longue saga judiciaire.
Si Michel Platini a déjà exclu un retour dans le football mondial, ce procès reste une étape cruciale pour sa réhabilitation morale. Quoi qu’il en soit, cette affaire a définitivement changé la gouvernance du football international, marquant la fin d’une époque et l’émergence d’une nouvelle génération de dirigeants.
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