Le Parlement iranien a récemment donné son feu vert pour une éventuelle fermeture du détroit d’Ormuz, un passage maritime stratégique par lequel transite près d’un tiers des hydrocarbures mondiaux. Si cette menace devenait réalité, elle pourrait faire basculer l’économie mondiale dans une nouvelle crise énergétique. Bien que la décision finale appartienne au guide suprême Ali Khamenei, la perspective soulève déjà de vives inquiétudes sur les marchés et dans les chancelleries.
Un point névralgique du commerce mondial
Le détroit d’Ormuz, étroit de seulement 33 km, est le goulot d’étranglement énergétique le plus critique au monde. Chaque jour, plus de 20 millions de barils de pétrole et 294 millions de mètres cubes de gaz naturel liquéfié y transitent, en grande partie destinés aux marchés asiatiques, mais dont la perturbation affecterait l’ensemble du marché mondial.
L’Iran, qui maîtrise parfaitement la géographie du détroit, pourrait le bloquer à l’aide de mines marines sophistiquées, de missiles côtiers ou de drones d’attaque. Il l’a déjà menacé par le passé, notamment pendant la guerre Iran-Irak. Aujourd’hui, une simple annonce ou perturbation suffit à faire grimper les prix et désorganiser le transport maritime, comme en témoignent déjà les premiers cas d’interférences GPS signalés dans la région.
Une flambée des prix… et de l’inflation
Selon des analystes de la Deutsche Bank, un blocage du détroit pourrait faire grimper le prix du baril jusqu’à 120 dollars. Le Fonds Monétaire International (FMI) avertit qu’une telle envolée aurait un effet domino sur les prix alimentaires et la consommation, dans un contexte déjà fragile de ralentissement économique et de tensions géopolitiques.
Contrairement aux idées reçues, le monde reste fortement dépendant du pétrole, qui représente encore 31 % de l’énergie primaire utilisée. Une hausse de 10 % du prix du baril augmente mécaniquement l’inflation d’environ 0,4 point dans les économies développées. Un choc de l’ampleur de celui des années 1970, bien que moins probable, ne peut être totalement écarté.
Les États-Unis et leurs alliés en alerte
Washington, qui dispose d’une présence militaire renforcée dans le Golfe, ne laisserait sans doute pas passer un blocage du détroit. Le secrétaire d’État américain Marco Rubio a averti que cela constituerait une “escalade dangereuse”, tout en appelant la Chine et l’Inde, grands consommateurs de pétrole iranien, à faire pression sur Téhéran.
Les risques de confrontation militaire sont réels, d’autant que le détroit est vital aussi pour l’Iran, qui y exporte son propre pétrole. D’un point de vue stratégique, Téhéran a tout intérêt à entretenir la menace, pour faire monter les prix et renforcer son pouvoir de négociation, sans aller jusqu’au point de rupture.
Une menace crédible, mais suicidaire
En définitive, la fermeture du détroit serait un pari à très haut risque pour un régime déjà sous pression économique et diplomatique. Téhéran pourrait perdre ses derniers alliés et s’exposer à une riposte militaire internationale. En maintenant la tension sans passer à l’acte, l’Iran maximise son influence tout en évitant les conséquences d’un “suicide économique”, comme le qualifient certains analystes.