Un vent d’inquiétude souffle sur les autorités financières marocaines. À l’approche de l’entrée en vigueur de la directive européenne CRD VI, qui risque de bouleverser en profondeur les transferts de fonds des Marocains résidant à l’étranger (MRE), Bank Al-Maghrib monte au créneau pour tenter d’en limiter les effets. En ligne de mire : un texte à portée protectionniste qui interdira, dès juillet, à toutes les banques non établies dans l’Union européenne d’opérer directement des transferts à destination de leurs clients installés dans l’UE.
Une mesure qui, si elle est pleinement appliquée, pourrait priver le Maroc d’une précieuse manne annuelle dépassant les 11 milliards de dirhams en devises – une source de revenus vitale pour la balance des paiements et les caisses de l’État. Car derrière ces transferts, c’est aussi une fiscalité qui s’évaporerait partiellement, au grand dam du Trésor.
Le gouverneur de la banque centrale, Abdellatif Jouahri, s’active déjà pour tenter de désamorcer cette menace. Première étape : Paris, où un dialogue est prévu avec le Trésor français. Objectif affiché : trouver des alternatives techniques viables et conformes au droit européen, dans le sillage du rapprochement politique et économique récemment renforcé entre les deux pays.
Mais l’enjeu est européen, pas uniquement franco-marocain. D’autres États comme la Belgique, l’Espagne, les Pays-Bas et l’Allemagne, qui abritent une forte diaspora marocaine, seront également ciblés par cette offensive diplomatique. Toutefois, Bruxelles pourrait s’opposer à tout accord bilatéral jugé contraire à l’esprit ou à la lettre de la directive CRD VI.
Pour le Maroc, l’enjeu est clair : protéger un flux vital qui irrigue des millions de familles et soutient des pans entiers de l’économie. Le compte à rebours est enclenché.
Par Jalil Nouri
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