Le ministère de la Santé s’attaque une nouvelle fois à l’épineuse question de la continuité des soins. Dans une récente circulaire adressée aux directions régionales et provinciales, le département d’Amine Tahraoui exige désormais l’affichage des listes de médecins de garde et un renforcement strict de la présence dans les services d’urgence. Officiellement, il s’agit de mieux organiser les gardes médicales, de sécuriser la permanence des soins et d’offrir plus de transparence aux citoyens sur les équipes en poste.
Sur le papier, la démarche apparaît comme un pas vers une meilleure gouvernance hospitalière. La Fédération démocratique du travail (FDT) y voit d’ailleurs un signal positif : son responsable de la communication, Hamza El Ibrahimi, rappelle que la clarté dans l’organisation des gardes est un pilier du service public. Mais il met en garde contre une vision trop administrative d’un système déjà sous tension. Pour lui, ces mesures n’auront de sens que si elles s’inscrivent dans une approche globale, qui tienne compte des réalités des hôpitaux, des contraintes de terrain et des droits des soignants, en particulier en matière de conditions de travail et de repos.
En parallèle, le ministère engage une autre réforme d’envergure : la réorganisation des stages des étudiants des Instituts des professions infirmières et des techniques de santé. Une circulaire datée du 19 novembre 2025 fixe un cadre unifié pour le suivi des stages et annonce une réflexion sur une éventuelle indemnisation de certaines missions effectuées par les étudiants. Une façon de reconnaître, au moins partiellement, leur contribution au fonctionnement des services, notamment dans un contexte de pénurie de ressources humaines.
Pour la Fédération nationale de la santé, affiliée à l’Union générale des travailleurs du Maroc, ces initiatives restent toutefois en deçà des enjeux. Son représentant, Adel Aouine, rappelle que les circulaires successives, y compris celles relatives au décret 98-15 sur la garde et la continuité du service, ne peuvent à elles seules compenser le manque criant de moyens. Manque de médecins, d’infirmiers, de techniciens, insuffisance du matériel, risques d’agressions dans les urgences, absence de repos compensatoire et d’indemnités à la hauteur de l’effort fourni : autant de facteurs qui rendent l’application stricte des nouveaux dispositifs difficile, voire irréaliste dans certains établissements.
Dans ce contexte, les syndicats appellent à dépasser la logique des rappels à l’ordre administratifs pour engager une véritable réforme structurelle. Adel Aouine plaide pour une amélioration profonde des conditions de travail, la modernisation des infrastructures, le renforcement des effectifs et l’implication des professionnels dans les décisions qui les concernent. Selon lui, ce n’est qu’à ce prix que les nouvelles directives – affichage des gardes, renforcement des urgences, encadrement des stages – pourront se traduire concrètement sur le terrain et redonner du sens à la notion même de continuité du service public de santé.
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