Le débat sur l’éducation sexuelle à l’école continue de diviser. Dans une société où les repères conservateurs demeurent puissants, l’idée de cours dédiés suscite suspicions et procès d’intention. En toile de fond, un malentendu tenace : pour beaucoup, « éducation sexuelle » rimerait avec incitation ou « discipline de la sexualité ». Or, les projets pédagogiques défendus par leurs promoteurs relèvent d’abord de la santé, de la découverte du corps, de la prévention (violences, agressions, grossesses précoces, infections), et de l’apprentissage du consentement et du respect de soi et d’autrui.
Le silence des médias — publics comme privés — n’aide pas. Faute de campagnes d’explication claires, la confusion prospère : la population ne sait pas toujours que ces cours, pensés graduellement selon l’âge, s’appuient sur une approche scientifique et psychosociale, loin des caricatures. Résultat : dans le public, le dossier s’enlise ; dans certains établissements privés, des modules existent déjà, mais sans cadre national partagé.
Du côté du ministère de l’Éducation, la prudence domine. À l’évocation du sujet, l’exécutif renvoie volontiers aux parents, suggérant que l’inclusion de ces cours au secondaire pourrait reposer sur le choix familial, sans obligation ni notation aux examens. Ce cadrage minimaliste apaise les tensions à court terme mais laisse sans réponse la question centrale : comment garantir, pour tous, un socle commun de connaissances et de compétences utiles à la protection des adolescents, y compris dans le monde numérique (cyberharcèlement, diffusion d’images intimes) ?
Au final, l’absence de consensus risque de priver les élèves d’un outil de prévention et d’ouverture d’esprit. Plusieurs pistes existent pourtant : séances d’information pour les parents, modules pilotes évalués, formation des enseignants et présence de référents (infirmiers scolaires, psychologues) ; un programme progressif, adapté à l’âge, et assorti d’un droit d’adhésion éclairée des familles. Entre refus de principe et adhésion aveugle, le compromis passe par la transparence et la pédagogie. L’éducation sexuelle n’est ni une option morale ni un tabou : c’est un outil de protection et un langage commun pour apprendre à grandir sans gêne ni arrière-pensées.
Par Salma Semmar
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